samedi 29 septembre 2012

The Glass Shield

Quatre après le désormais introuvable To Sleep with Anger avec Danny Glover, Charles Burnett revient avec un thriller halletant sur fond de racisme policier : L'insigne de la honte.

THE GLASS SHIELD - Charles Burnett (1995)


L'adjoint John "JJ" Johnson (Michael Boatman) est une jeune recrue afro-américaine de la police de Los Angeles. Le seul Noir du commissariat, négativement réputé pour ses bavures racistes. L'unique collègue qui est sympa avec lui est la seule femme, l'agent Deborah Fields (Lori Petty), cible des railleries sexistes des autres flics.
Un soir, le jeune Teddy Woods (Ice Cube) est arrêté par JJ et Jack Bono et l'arme dans la boîte à gant de sa voiture semble être celle qui a servi lors d'un meurtre. Soucieux de s'intégrer au mieux auprès de ses collègues, JJ fait même un faux témoignage pour enfoncer le jeune Woods.
De son coté, ce dernier nie l'assassinat et est assisté par son avocat brillant et combattif : James Locket (Bernie Casey) qui met à jour plusieurs failles et faits troublants...
Le budget est très limité de 8 millions de dollars, mais c'est plus que ce à quoi s'est habitué le cinéaste Charles Burnett, précurseur du cinéma réaliste afro-américain. La réalisation, comme le scénario, sont plus ordinaires que Killer of Sheep et My Brother's Wedding. Burnett mixe plusieurs grands classiques du cinéma américain : le film policier empli de ripoux, les longues scènes d’interrogatoires au tribunal, le drame amoureux, la pression du racisme et du sexisme...

Au premier abord, après un générique façon comic strip,  on semble face à un téléfilm policier assez ordinaire, voire un peu pataud, qui peine à se mettre en place. Mais dès l'arrestation d'Ice Cube, l'intrigue est enfin lancée et Burnett introduit une dizaine de personnages secondaires assez fouillés et plonge le spectateur dans un sombre polar doublé d'un drame psychologique où chaque personnage a sa logique propre. Même le racisme n'est pas présenté comme un bloc monolithique : racisme ordinaire du flic de base qui contrôle au faciès, racisme cynique de la hiérarchie policière et judiciaire.

Autre nouveauté pour Charles Burnett : il s'entoure cette fois d'actrices et acteurs professionnels, aussi bien afro-américains que blancs. Parmi ses derniers citons quelques habitués de production "black" comme Don Harvey (Life, In Too DeepShe Hate Me...) et M. Emmet Walsh (, Panther, A Time to Kill) et Michael Ironside (Jo Jo Dancer...). millions de dollars.
Pour ce qui est des Afro-Américains, Burnett offre un très bon rôle à Bernie Casey, très convaincant en avocat tenace. Se succèdent aussi Ernie Lee Banks (Baby Needs a New Pair of Shoes, The Black Godfather, Bulworth), Tommy Redmond Hicks (découvert par Spike Lee dans She's Gotta Have It, on le croise peu : le téléfilm Death of a Prophet, Daughters of the Dust, The Meteor Man, The Five Heartbeats), Victoria Dillard (Coming to America, Deep Cover, Black Rebel, The Best Man... elle incarne Betty Shabazz dans Ali), Kimble Jemison (Life, Bowfinger), David McKnight (J.D.'s Revenge) et Sy Richardson son complice de longue date.

Cependant, malgré ce casting assez incroyable et la mise en avant du rapeur Ice Cube (qui débute sa reconversion et s'affirme comme une figure montante du cinéma afro-américain après Boyz N the Hood), ne parvient pas à dynamiser les entrées et les recettes s'élèvent péniblement à quelques 3

lundi 24 septembre 2012

My Brother's Wedding

6 ans après son mythique film de fin d'études Killer of Sheep, Charles Burnett revient avec son premier film comme véritable professionnel du cinéma...

MY BROTHER'S WEDDING - Charles Burnett (1983)

Ghetto de Watts, Los Angeles, à l'aube des 80s, Pierce Mundy (Everett Silas) est un jeune ordinaire ; il vit chez ses parents et travaille dans la laverie familiale. Son frère Wendell (Monte Easter) est en plein préparatif de mariage avec Sonia Dubois (Gaye Shannon-Burnett), issue d'une famille bourgeoise, au grand dam de Pierce.
D'un autre coté son ami Soldier (Ronnie Bell) sort de prison.
Mais ce dernier meurt et Pierce se trouve devant un dilemne : l'enterrement tombe en même temps que le mariage...
Moins connu que son précédent Killer of Sheep accédant au fil du temps au rang de film culte, Charles Burnett délaisse le noir et blanc pour la couleur, mais reste dans la même veine réaliste. Peut-être même ce deuxième film est-il plus abouti.

Burnett est toujours à presque tous les postes de la production ; il confie cependant le montage au monteur afro-américain Thomas Penick (Trouble Man, The Spook..., Leadbelly). Le budget est minimum (50 000 $), mais les distributeurs ne sortent le film que dans une seule salle. Il faudra attendre la fin des années 2000 pour voir le film ressortir sur grand écran puis en DVD (accompagné de deux courts), grâce à Milestone Film.

Burnett dresse un tableau tendre mais sans concession de la vie quotidienne dans la communauté afro-américaine ; il n'utilise aucun procédé technique permettant de montrer une préférence pour un personnage ou d'appuyer une scène. La mise en scène est volontairement proche du documentaire (son assistante de réalisateur n'est autre que la prometteuse Julie Dash qui signe l'excellent Daughters of the Dust), Burnett filme avec la même intensité les scènes d'action, de drame, d'amour ou de conflit, il offre le même traitement à une scène de drague qu'à la mort d'un homme. Il n'y a pas de morale assénée, de parti pris juste une chronique sans commentaires.

Comme dans son premier film, Burnett s'appuie sur un casting composé presqu'uniquement d'amateurs-  qu'il égraine fidèlement durant le générique de fin- au premier rang desquels Everett Silas pourtant magistral et sa famille, sa femme Gaye Shannon-Burnett qui incarne la jeune bourgeoise et sa fille Angela.
On retrouve cependant quelques actrices et acteurs tels Cora Lee Day (The Human Tornado, Dr. Black, Mr. Hyde, Passing Through, Bush Mama, Daughters of the Dust, Tina), Frances E. Nealy (Darktown Strutters), Dennis Kemper (Harlem Nights) et surtout Sy Richardson, qui vit d'apparitions dans des séries ou des grosses productions comme Colors ou dernièrement Our Family Wedding, mais tourne dès le début dans des films afro-américains indépendants comme Petey Wheatstraw, To Sleep with Anger, The Glass Shield, Posse, All About Us...

jeudi 20 septembre 2012

Killer of Sheep

Sorti à la fin de la vague blaxploitation, Killer of Sheep relève plutôt du nouveau cinéma réaliste afro-américain dont Spike Lee sera, 10 ans plus tard, le principal artisan...

KILLER OF SHEEP - Charles Burnett (1977)


Ghetto de Watts, Los Angeles. Stan (Henry G. Sanders) est un employé dans un abattoir pour ovins.
Sa vie est morose entre sa femme qui le laisse indifférent (Kaycee Moore), ses enfants (Angela Burnett & Jack Drummond) et ses amis (Tobar Mayo, Eugene Cherry, Charles Bracy...) qui essaient de l'entraîner dans toutes sortes de combines qui le sortent de son quotidien ennuyant et lui promettent d'arrondir son salaire...
Difficile de faire le résumé de l'histoire, car le film se compose de vignettes décrivant la vie quotidienne de plusieurs Afro-Amréricains dans le ghetto de Watts, "célèbre" pour ses émeutes.
Souvent comparé au néo-réalisme italien, Burnett pose un regard quasi documentaire sur un homme noir-américain ordinaire, ouvrier et père famille, qui vit sa vie en fantôme, un peu comme une mise en image du concept marxiste d' "aliénation", cette déshumanisation conséquence du travail à la chaîne. Mais ici pas de révolte, juste un sourd constat sans angélisme et sans grand espoir...
Un film sublime donc. Et pourtant, lorsqu'il réalise Killer of Sheep Charles Burnett n'est encore qu'étudiant à l'UCLA !
Avec seulement 10 000 $, il consacre ses week-ends à ce projet. Il est à tout les postes : réalisateur, producteur, scénariste, chef opérateur et monteur.

Burnett arrive en fin de course de la blaxploitation et son film sort par trop des canons du genre pour intéresser les distributeurs. On retrouve l'interrogation sur la vie moderne urbaine que dans Top of the Heap, en moins allumé et techniquement mieux maîtrisé ; et le personnage principal est tellement ancré dans la réalité que rêver n'est pas une option pour lui.

Autre spécificité logique découlant du mode de production, le casting est composé d'amateurs. Plus d'une cinquantaine ! Que Burnett s'applique à citer au générique. Quelues rares noms sont connus comme Henry G. Sanders, qui a joué déjà dans The Black Godfather, Baby Needs a New Pair of Shoes, puis des dizaines de seconds rôles dont le "gentil Noir" dans Docteur Quinn, femme médecin et dernièrement Rocky Balboa ou Blue... ou encore Tobar Mayo (Abar, the First Black Superman, Tough et Baby Needs... et Big Time) et Kaycee Moore (que l'on revoit dans Daughters of the Dust de Julie Dash).
Pour le reste, Burnett s'appuie sur ses proches (dont nombreux retravaillent avec lui sur My Brother's Wedding, To Sleep with Anger, The Glass Shield et Namibia: The Struggle for Liberation), en particulier sa fille Angela, Charles Bracy et Eugene et Dian Cherry...

En 1981, il décroche  le Prix de la Critique au festival de Berlin. Dix ans plus tard, il a été proclamé "national treasure" par la Bibliothèque du Congrès et placé dans les cinquante premiers films du National Film Registry. Quant à l'influente Société Nationale des Critiques de Films, elle l'a pour sa part classé parmi les cent films les plus importants de tous les temps. Cette reconnaissance du travail de Charles Burnett est d'autant plus étonnante qu'elle vient du milieu du cinéma lui-même. Longtemps insorti pour causes de droits musicaux, plusieurs réalisateurs, dont Steven Soderbergh, rachètent ces droits pour cent cinquante milles dollars et permettent ainsi la restauration et la sortie du film en 2008.

dimanche 16 septembre 2012

Wattstax

Le documentaire Wattstax a toute sa place dans la courte liste des films blaxploitation ouvertement militants...

WATTSTAX -  Mel Stuart (1973)

" On a tous quelque chose à dire, mais certains ne sont jamais entendus.Il y a plus de 7 ans, les gens de Watts ont fait front, et ont exigé d'être entendus. Un dimanche d'août dernier, au Colisée de Los Angeles, plus de 100 000 Noirs se sont rassemblés pour commémorer ce moment de l'histoire américaine. Pendant plus de six heures, le public a écouté, vibré, chanté, dansé, et crié le verbe vivant dans une expression pleine d'émotions de l'expérience noire. Voici le film de cette expérience, et de ce que certains ont à dire. "
Ce sont les mots d'introduction de Richard Pryor. Ils résument à perfection l'essence de ce film qui est plus qu'un simple concert. Wattstax, c'est le Woodstock afro-américain, un festival organisé par Stax Records (qui mobilise  ses artistes les plus en vue) dans le quartier de Watts, à Los Angeles, d'où partirent les émeutes dans les ghettos afro-américains en 1965.
Des Bar-Kays et leur Son of Shaft à Kim Weston, de  Jimmy Jones aux Staple Singers, en passant par The Dramatics (qui apparaissent dans l'allumé Darktown Strutters), The Emotions ou encore Rufus Thomas, magistral, qui joue avec le public, incitant des centaines de spectateurs à sauter les barrières pour venir danser puis les y renvoie en quelques secondes, provoquant des suées aux agents de sécurité !Ce sont les plus grands artistes de la firme qui défilent dans le Colisée de Los Angeles ; le clou du spectacle étant évidemment le "Black Moses" Isaac Hayes déboulant en limousine et introduit par Jesse Jackson.
Cependant Wattstax est plus qu'une simple compilation de titres live. C'est un film documentaire qui décortique la vie des Afro-Américains dans la période des 70s donnant la parole au public, à de jeunes acteurs originaires de Watts tels Ted Lange (second rôle durant la période blax, il sera connu dix ans plus tard comme Isaac de La croisière s'amuse), Erik Kilpatrick (Black Girl, la série The White Shadows, New Jack City, Deep Cover, Hoodlum) ou encore Fred Berry (qui connaîtra la gloire dans What's Happening !!).
Plusieurs sujets sont abordés, collant plus ou moins aux thèmes des chansons et illustrés par des sketches souvent hilarants de Richard Pryor. Inconnus et artistes évoquent les émeutes de 65, le racisme et le chômage qui frappe la Communauté, la religion, l'amour et les relations hommes/femmes...

Ce film possède une âme et transmet à la perfection l'ambiance, les préoccupations et les combats de l'époque pour les Noirs américains.

Nombre de personnalités afro-américaines participent à l'organisation (à l'image de Melvin Van Peebles, originaire de Watts, qui drive les techniciens et introduit The Staple Singers). Le pasteur Jesse Jackson, remplaçant de Martin Luther King à la tête de la SCLC, enflamme plusieurs fois le public en accueillant Isaac Hayes sur la scène ou en ouvrant le festival sur un vibrant discours conclu par le poème I am Somebody, repris par les spectateurs le poing levé.

Et le public justement est un personnage à part entière de ce documentaire. Les places pour assister aux réjouissances ont été distribuées pour un seul petit dollars permettant à 100 000 personnes de remplir le stade du Colisée. Les spectateurs -parmi lesquels on peut reconnaître Ossie Davis et Ruby Dee- sont fabuleusement filmés , s'amusant, vibrant au son des chansons et des discours, dansant, riant et partageant avec insouciance ce grand moment de culture populaire.

lundi 10 septembre 2012

The Spook Who Sat by the Door

On continue sur les films militants avec l'incroyable film d'Ivan Dixon : Notre agent de Harlem

THE SPOOK WHO SAT BY THE DOOR 
- Ivan Dixon (1973)

Le sénateur Hennington (Joseph Mascolo) en pleine réélection a l'idée d'ouvrir la CIA à des membres noirs. Voilà donc l'agence qui intègrent donc une promotion exclusivement d'hommes afro-américains. Le seul à parvenir au bout de la formation est Dan Freeman (Lawrence Cook), un travailleur social de Chicago, apparemment bien sous tous rapport.
Mais au bout de quelques années de travaux ingrats au sein de l'agence, Dan Freeman démissionne et retourne à Chicago reprenant son boulot ,au contact des pauvres du ghetto. Freeman a une idée en tête : recruter des militants nationalistes noirs pour les entraîner à la guérilla urbaine en vue d'opérations politique. Il crée les "Freedom Fighters"...
Le titre est à double sens. "The spook who sat by the door" fait référence aux premiers temps de l'affirmative action lorsque les entreprises remplissaient leur quotas raciaux en engageant un portier noir. Le mot spook peut être entendu aussi comme agent secret... et il résume la double problématique avancée par Ivan Dixon : le questionnement de l'affirmative action et l'actualité de la révolution noire.

Malgré un lieu commun qui fantasme la blaxploitation comme un courant militant, rares sont les films vraiment politiques ; et dans ce petit cercle fermé de moins d'une dizaine de titres, The Spook... est le seul à présenter positivement un groupe paramilitaire organisé capable de rivaliser efficacement avec les forces de l' "ordre".
Dixon semble suivre les préceptes de Melvin Van Peebles qui dans son journal de tournage de Sweetback... affirmait que "le film ne pourra pas se contenter d'être un simple discours didactique projeté [...] dans un cinéma vide, à l'exception de dix ou vingt frères déjà convaincus qui me taperont sur l'épaule en me disant que le film dit vraiment la vérité. [...] Il doit être capable d'exister comme un produit commercial viable sinon il n'aura aucun pouvoir". C'est clairement l'ambition d'Ivan Dixon qui construit son film avant tout comme un film d'action et d'espionnage de facture assez classique ; la différence c'est que le héros est un révolutionnaire et que le réalisateur, complaisant, prend le temps d'expliciter sa pensée politique. Rare ! Dixon fait oeuvre de pédagogie ; il fait s'affronter les deux grandes tendances des militants afro-américains, expose -parfois un peu lourdement- les thèses de chacun et parvient à divertir les adeptes de films d'action et d'espionnage tout en développant un discours contestataire.

Entre la musique signée Herbie Hancock, de bons dialogues et un rythme soutenu, on passe plus qu'un bon moment devant The Spook... Et, même si je ne m'explique pas comment ce film put être diffusé sans encombre, il reçoit à sa sortie un accueil enthousiaste, dans la population afro-américaine en particulier. Le fait qu'il ait longtemps été difficilement visionnable (Warner l'a réédité en DVD à la demande) n'a pas terni sa réputation, qui s'en est même trouvée renforcée comme le film le plus ouvertement révolutionnaire de la blaxploitation. Dans les bonus DVD, on peut voit le réalisateur et acteur Robert Towsend témoignant de l'effet positif que lui fit ce héros révolutionnaire, en comparaison des Super Fly, Shaft et autres Willie Dynamite.

Et c'est vrai que Lawrence Cook incarne un autre style de héros, moins viril et arrogant mais tout aussi efficace ! Après de petits rôles dans  The Man, Cotton Comes to Harlem, The Landlord et Trouble Man, Cook accède là au rôle plus intéressant de sa carrière (suivront entre autres Lord Shango et Posse, le western post-blaxploitation de Mario Van Peebles).
En outre, il y a pas mal de seconds rôles de l'époque tels que Paula Kelly (Cool Breeze, Top of the Heap, Three Tough Guys, Uptown Saturday Night, Drum, Jo Jo Dancer..., D.R.O.P. Squad), J.A. Preston (qui tournera dans nombres de séries), Doug Johnson (The Lost Man, Buck and the Preacher, Cleopatra Jones, Let's Do It Again, Stir Crazy), Paul Butler (The Blues Brothers, To Sleep with Anger, Strictly Business), Don Blakely (Shaft's Big Score !, Harlem Nights, Pulp Fiction), Beverly Gill (Scream Blacula Scream), Colostine Boatwright (Cooley High), Lenart Norris (Mahogany) et Joseph Mascolo (le méchant de Shaft's Big Score !) qui incarne un sénateur prêt à toutt pour sa réélection.

mercredi 5 septembre 2012

The Final Comedown

Là où Top of the Heap utilise le burlesque pour sortir son héros du quotidien, celui d'Emeute à Los Angeles opte pour l'action politique pour changer le cours de sa vie  et de ses frères sœurs...

THE FINAL COMEDOWN - Oscar Williams (1972)


Johnny Johnson (Billy Dee Williams) est le chef d'un groupe de militants afro-américains. Avec ses camarades, il déclenche une opération qui tourne mal et finit en fusillade ; Johnny est touché. Retranché dans une ruelle en attendant un docteur et l'assaut de la police, Johnny se remémore des passages de sa vie : son enfance, ses expériences amoureuses, sa révolte contre ses parents, sa rencontre avec le dirigeant nationaliste noir Imir (Raymond St. Jacques), l'impossibilité d'avoir un job décent à cause de sa couleur...
Oscar Williams écrit et réalise ce véritable brûlot politique ; il livre un film incroyable, aussi percutant que Sweet Sweetback... bien que artistiquement moins innovant. Contrairement à Melvin Van Peebles, Oscar Williams continuera de tourner après ce film ultra-politique : la comédie -légère mais politique- Five on the Black Hand Side, Hot Potato avec Jim Kelly, Death Drug avec Philip Michael Thomas et il signe les scenarii de Truck Turner et Black Belt Jones.

Sous l'impulsion de Roger Corman, le pape du cinéma bis, le film est remonté, agrémenté de 20 minutes supplémentaires et ressortis sous le nom Blast ! C'est un petit studio français qui, Le chat qui fume, qui en propose la version "director's cut", avec en prime des sous-titres français de très bonne facture (ainsi qu'une débauche de bonus).
Le budget est serré, les scènes d'action légèrement surjouée mais bien stylisée et les cascadeurs sont à l'honneur entre Henry Kingi, Clifford Strong  (D.C. Cab, I'm Gonna Git You Sucka, Ghost Dad, il joue aussi dans Harlem Nights) et Ernest Robinson (Halls of Anger, The Spook Who Sat by the Door, Cleopatra Jones, Black Samson, The Black Six, Dr. Black, Mr. Hyde). Le tout accompagné de la musique endiablée du compositeur Wade Marcus et du monstrueux guitariste de jazz Grant Green.

Avec des moyens rudimentaires, le scénariste/réalisateur impose son rythme, malmène le spectateur avec une violence crue et maîtrisée, et le plonge dans une ambiance suffocante de guérilla urbaine et des flashbacks qui permettent de comprendre le parcours d'un jeune afro-américain ordinaire qui pense à l'avenir, au travail et aux filles mais se trouve en butte face au racisme institué et l'exemple de parents méritants, mais trop soumis aux Blancs selon le jeune héros en quête d'indépendance tant familiale que politique...
Le film est un condensé de toutes les problématiques de l'époque pour la communauté afro-américaine, rien ne semble laissé au hasard : du travail du père cireur de chaussure à la solidarité des blancs libéraux et travailleurs juifs, de la représentation de la sexualité (avec une intense scène d'amour) aux petites phrases et aux regards apparemment anodins mais chargé du racisme ordinaire, de l'ami traumatisé par ce qu'il a fait et vu au Vietnam aux harcèlements policiers contre les militants...
Par contre, sans en dévoiler beaucoup, c'est le nihilisme et le désespoir qui prennent le pas sur la résistance et l'espoir.

Étonnamment le jeune débutant Billy Dee Williams ne sera pas non plus handicapé par ce rôle politique : il devient le dandy incontournable de la période (Lady Sings the Blues, Hit !, The Take, Mahogany, The Bingo Long Traveling...) et atteint la renommée avec sa participation aux deux derniers volets de Star Wars.
Le casting est assez resseré. Il y a D'Urville Martin, plutôt habitué à des blaxploitation movies plus groovy, dont la liste est d'ailleurs impressionnante : Black Like Me, Guess Who's Coming to Dinner, Watermelon Man, The Legend of Nigger Charley, Hammer, Black Caesar, Book of Numbers, The Soul of Nigger Charley, Hell Up in Harlem, The Zebra Killer, Sheba, Baby, Boss Nigger, Dolemite, Disco 9000, Death Journey, Black Samurai, Blind Rage...
En "guest", apparaît le grand Raymond St. Jacques, acteur phare qui s'engage réellement en apportant sa caution et sa renommée au film.
D'autres sont moins connus, tels Ed Cambridge (Trouble Man, Cool Breeze, Melinda, Friday Foster, Soul of the Game, Deep Cover), Cal Wilson (Halls of Anger, The Great White Hope, Five on the Black Hand Side, Baby Needs a New Pair of Shoes, Disco 9000), Morris D. Erby (The Lost Man, A Man Called Adam) ou Pamela Jones (Buck and the Preacher, The Limit, Passing Through).