dimanche 29 août 2010

The Wiz

Remake afro-américain du Magicien d'Oz à la sauce "blax"...

THE WIZ - Sidney Lumet (1978)


En tentant de rattraper son chien Toto, Dorothy (Diana Ross) -une institutrice de Harlem qui vit encore chez son oncle et sa tante- est emportée dans un tourbillon de neige ; elle atterrit à Munchkinland, une région du pays d'Oz.
Elle tue par inadvertance la méchante sorcière de l'est et libère d'étranges enfants enfermés dans des grafittis. Eberluée, elle veut retourner chez elle ; pour celà, elle doit rencontrer le Magicien d'Oz -"The Wiz".
Dans son périple, Dorothy rencontre un épouvantail sans cervelle (Michael Jackson), un homme de fer sans coeur (Nipsey Russell) et un lion sans courage (Ted Ross). Ensemble, ils décident de demander au magicien ce qui leur fait défaut.
Mais celui-ci conditionne son aide : Dorothy et ses comparses doivent supprimer la méchante sorcière Evilene (Mabel King).

Ce film est une double adaptation : d'abord du célèbre Magicien d'Oz revisité d'un point de vue afro-américain ensuite la transposition cinématographique d'une comédie musicale jouée à Broadway.
D'abord le casting s'en ressent avec l'emploi de Stanley Greene, Mabel King (déjà croisée dans Ganja & Hess ou The Bingo Long Traveling All-Stars & Motor Kings) ou Thelma Carpenter qui jouent aussi dans la comédie de Broadway. De même que le foisonnement de chanteurs de métier comme Nipsey Russell, Thelma Carpenter, Rhetta Hughes (présente dans Sweet Sweetback's Baadasssss Song et Don't Play Us Cheap) et certains qui font leur premier pas (à l'instar de Joshie Armstead, Roberta Flack, Robin Givens, Ray Simpson des Village People...), des danseurs et chorégraphes tels Carlton Johnson et Joe Lynn,

La mise en scène de Sidney Lumet est assez typique aussi des adaptions avec une succession de tableaux où s'entremêlent comédie classique, chants et danses endiablées. On a droit à de véritables ballets plutôt bien filmés et des décors post-apocalyptiques à la Mad Max.
Alors, c'est sûr qu'à l'heure du tout numérique et de la 3D, cette comédie musicale, ses costumes et ses décors paraissent bien cheap. Cependant, pour l'époque, The Wiz est bien un film à grand spectacle très respectable et techniquement abouti, avec de très jolie trouvailles graphiques (à l'image de la "transformation" des adeptes de la sorcière, le micro vivant, ou encore la saynète avec les corbeaux et Michael Jackson).
Il n'en reste pas moins que le films souffre de certaines longueurs (il faut une heure entière à Dorothty pour rencontrer ses compagnons d'infortune).

Par contre, je trouve la prestation de Diana Ross sans relief. Les deux surprises viennent plutôt d'un débutant et d'une ancienne gloire. Pour le premier il s'agit de Michael Jackson, assez lisse dans son personnage d'épouvantail mais très convaincant dans ses prestations scéniques. Pour la seconde, d'une grande dame qui nous a quitté cette année : Lena Horne, pour son dernier long métrage , impressionnante dans un un solo magistral en guise de quasi-clôture du film.
A noter aussi les cascades de Steve James (qui deviendra entre autre Kun-Fu Joe dans I'm Gonna Git You Sucka).



mardi 24 août 2010

Mahogany

Unique film de Berry Gordy en tant que réalisateur, ce producteur de génie reprend le duo qui avait si bien marché dans Lady Sings the Blues : sa chanteuse de femme Diana Ross et l'éternel dandy Billy Dee Williams.

MAHOGANY - Berry Gordy (1975)


Tracy Chambers (Diana Ross) fait des études pour être une styliste ; tandis que sa tante Florence (Beah Richard) les lui confectionne. Tracy habite dans les quartiers noirs et pauvres de Chicago, c'est là qu'elle rencontre Brian Walker (Billy Dee Williams), un juriste qui milite pour faire respecter les droits des Afro-Américains.
En parallèle de ses études, Tracy travaille comme secrétaire et femme-à-tout-faire dans une agence de mode. Un jour, un photographe (Anthony Perkins) la remarque et lui demande de poser ; sa patronne ne voit pas d'un bon oeil la promotion des Noirs. en outre, ses croquis ne trouvent pas preneur...
Tandis que Brian se lance dans une campagne électorale, Sean -le photographe- propose un boulot à Tracy... à Rome. Elle y devient un célèbre mannequin, multipliant publicités et couvertures de magazine sous le nom de Miss Mahogany.

On ne retrouve pas la force de Lady Things the Blues, dans cette comédie romantique. Pari perdu de ce point de vue, puisqu'il est incontestable que le maitre en affaire Berry Gordy espérait rééditer le succès tant artistique que commercial du biopic sur Billy Hollyday (il en reprend d'ailleurs l'architecture sous forme de flashback). Pour l'aspect financier, par contre le bilan positif, doublé d'excellents chiffres de vente pour la Bande Originale (signée Michael Masser) et en particulier la chanson "Do You Know Where You're Going To" interprétée par Diana Ross.
Sans être mauvaise, la réalisation de Berry Gordy est plate et sans relief. Il se contente de suivre les protagonistes, sauf peut-être au milieu du film avec un clip tout en fondu et à la gloire de sa femme splendide.
L'affrontement en toile de fond entre la philosophie individualiste et la volonté de réussite personnelle de Mahogany/Diana Ross, et le combat politique et collectif représenté par Brian/Dee Williams reste trop superficiel à mon goût (et se cantonne à des poncifs mielleux). Cependant, le film s'avère sévère et sans concession sur le milieu de la mode.

Le duo Ross/Dee Williams fonctionne toujours très bien. C'est surtout les acteurs secondaires qui attirent l'attention, et spécifiquement, le personnage de Sean le photographe infect et névrosé qui est un de ces salauds qu'on adore détester ; il est interprété par Anthony Perkins, l'inquiétant et mythique Norman Bates de Psychose.
Par ailleurs, il faut noter la présence de la trop rare Beah Richard (In the Heat of the Night, Guess Who's Coming to Dinner et The Great White Hope) qui est resplendissante ici, de Lenard Norris (The Spook Who Sat by the Door), de Pemon Rami (qui joue dans Three Tough Guys et travaille comme casteur de figurant sur ce film ainsi que Cooley High et The Monkey Hustle) et du Français Jean-Pierre Aumont.

mardi 17 août 2010

Lady Sings the Blues

Dans cet été bien rempli, le fort beau billet de Culture Street sur Billie Holiday m'incite à publier cette fiche sur la très réussie biographie de la chanteuse ; un projet Motown piloté par Berry Gordy et une première et très convaincante prestation de Diana Ross.

LADY SINGS THE BLUES - Sidney J. Furie (1972)

Suite à son viol sordide, la jeune Eleanora (Diana Ross) arrive à New-York où elle retrouve sa mère (Virginia Capers), une employée de maison qui n'a pas grand chose à lui offrir ; elle lui trouve un travail dans un bordel de Harlem. Eleanora fait le ménage pour un maigre salaire, puis se prostitue finalement.
Mais ce dont elle rêve c'est de chanter dans le club d'en face. Un soir, elle quitte le bordel et arrive à imposer au patron du nightclub, Jerry (Sid Melton), de l'auditionner. Convaincu, il l'engage... sous le nom de Billie Holiday.
Ses prestations ne convainquent pas le public (qui préfère les filles nues), mais lui permettent de faire ses classes, au côté de Piano Man (Richard Pryor) qui l'accompagnera pendant le reste de sa carrière. Coté sentimental, elle s'énamoure d'un jeune dandy Louis McKay (Billy Dee Williams).
Rapidement, des musiciens -blancs- lui proposent de les suivre en tournée à travers le pays ; c'est le début de la gloire, mais aussi des mélanges explosifs de drogues et d'alcool conjugués à une dépression accrue...

Le scénario est basé essentiellement sur l'autobiographie de Billie Holiday (ce qui n'est en rien synonyme de réalité, puisque celle-ci serait déjà plutôt édulcorée, quant à la dureté de sa jeunesse en particulier). Mais les grands moments marquants de sa vie sont habilement amenés, à l'image de sa découverte du Sud et de ses trop célèbres lynchages (qui lui inspirent son émouvant "Strange Fruits"), de son internement, du Carnegie Hall...
Dès le générique, l'on sent une ambiance pesante, noire, soutenue par la musique orchestrale du compositeur français Michel Legrand. A l'image de sa vie, le film recèle une tension tragique tout du long... on souffre pour et avec Billie Holliday.
Le film raconte la vie d'un personnage, mais raconte aussi une époque et un point de vue, celui d'une jeune Afro-Américaine à la voix hors-norme au destin à la fois commun et particulier.

Gordy fait plus que réussir son pari d'imposer dans un grand biopic sa femme, égérie des Supremes. Il remporte un grand succès, aussi bien financier qu'auprès du public et des critiques ; il obtient en sus 5 nominations aux Oscars (ce que se fait rarement alors pour un film noir), dont une pour la meilleure actrice.
Il faut dire que tous les moyens sont là ; la réalisation est léchée. Les séquences musicales s'appuient sur un certain nombres de pros (Paul Hampton, la chanteuse Yvonne Fair, le vieil acteur et musicien Jester Hairston...), ainsi que la partition et la direction d'orchestre de Michel Legrand. Enfin, les acteurs de qualité sont au rendez-vous (un casting de Joe Scully). Billie Dee Williams interprète à la perfection un dandy amoureux, Richard Pryor joue là un de ses rôles "traditionnels" qui -à mon avis- lui vont à merveille (loin des mimiques de ces comédies des années 80) ; mais aussi Virginia Capers, Scatman Crothers et Sid Melton, ainsi que quelques gueules croisées ça ou là telles que Jayne Kennedy, Isabel Sanford (Guess Who's Coming To Dinner, Hickey and Boggs, Soul Soldier puis  Original Gangtsas et Sprung), Tracee Lyles, Norman Bartold ou Lynn Hamilton.