jeudi 30 août 2012

Top of the Heap

Cet OVNI blaxploitation est un peu un rejeton illégitime de Shaft, produit grâce aux cachets d'un des acteurs secondaires : Christopher St. John.

TOP OF THE HEAP - Christopher St. John (1972)
George Lattimer (Christopher St. John) est un des rares agents afro-américains de la police de Washington. Au boulot, il subit d'un coté le racisme de ses collègues majoritairement blancs (capables de l'arrêter et l'insulter lorsqu'il n'est pas en uniforme), de l'autre les accusations de traîtrise proférées par les gens de la rue. Niveau personnel, ça n'est pas non plus la panacée. Il jongle entre sa femme qui le fatigue, sa maîtresse et sa fille droguée.
Pour s'évader de cette vie morose, George fantasme dur ; il se rêve tantôt astronaute, tantôt explorant l'Afrique, tantôt soignée par une infirmière dénudée...

Avec Sweet Sweetback's Baadasssss Song, Melvin Van Peebles avait l'ambition de créer un cinéma afro-américain indépendant, avec sa touche, sa mise en scène, ses scénari originaux... Christopher St. John est de fait un de ses disciples.
Il incarnait le militant Ben Bufford dans Shaft ; l'argent qu'il touche pour ce gros succès, il le réinjecte dans ce projet indépendant totalement original, qui ne ressemble à rien des dizaines de films classés dans la blaxploitation. Pourtant, il en possède les caractéristiques principales comme le réalisateur et l'acteur principal afro-américain, des déambulations urbaines et une sombre photographie des rapports sociaux et raciaux ainsi qu'un soundtrack de J.J. Johnson (Man and Boy, Across 110th Street, Cleopatra Jones, Willie Dynamite, ...).
Avec de maigres moyens, Christopher St. John réalise une œuvre riche qui, malheureusement, ne sort que dans quelques salles ; il doit probablement de ne pas avoir sombré dans un oubli total à sa projection dans plusieurs festivals internationaux.

Dans la forme comme dans le fond, Top of the Heap est un film anti-système. Le "héros" est sensiblement différent de celui que l'on croise dans les films soul. Ni un super flic, ni un ripoux. Ni une bête de sexe, ni un Oncle Tom asexué. Et c'est justement cet ordinaire que questionne St. John à travers les problèmes existentiels de son personnage. Il interroge la monotonie de la vie urbaine moderne, les mensonges et les mesquineries, la façon dont fonctionne l’ascension sociale pour les Afro-Américains.
La seule actrice un peu connue est Paula Kelly ; elle tourne dans plusieurs films blax importants comme Cool Breeze, Trouble Man, The Spook Who Sat by the Door, Three Tough Guys, Lost in the Stars, Uptown Saturday Night, Drum. Elle parvient à survivre dans les années 80 avec Jo Jo Dancer, Your Life Is Calling, D.R.O.P. Squad ou encore les séries Night Cour et Santa Barbara.
Pour le reste, on croise quelques seconds couteaux habitués du cinéma afro-américain indépendant comme Damu King (Shaft, Black Girl, Sweet Jesus, Preacherman, Black Samson, The Black Godfather, Black Starlet, Blackjack), Ji-Tu Cumbuka (Up Tight !, Blacula, Dr. Black, Mr. Hyde, Mandingo, Moving, Brewster's Millions, Harlem Nights), Jerry Jones (comparse de Rudy Ray Moore dans Dolemite, The Human Tornado et Disco Godfather, il joue également dans Hit ! et Hit Man), Almeria Quinn (Friday Foster, Blue Collar) et le boxeur Ken Norton. Ou encore l'acteur blanc Joe Tornatore, qui participe à plusieurs blax importants : Sweet Sweetback..., Cleopatra Jones, Sweet Jesus, Preacherman et Black Samson.

dimanche 26 août 2012

Shaft : Still The Man



SHAFT : STILL THE MAN - Kevin Gorman (2000)

En avance sur son temps, Gordon Parks avait fait un making of à son Shaft : Soul on Cinema.
Pour accompagner son spin off Shaft 2000, John Singleton reprend l'idée avec ce Still the Man. A mon sens, il s'en sert surtout pour souligner et expliquer les rapports avec la trilogie originale, et ce making of s'apparente plus à un bon coup de pub et un passage obligé à l'heure du DVD et des bonus...



mercredi 22 août 2012

Shaft 2000

30 ans après le premier film mettant en scène John Shaft, John Singleton s'attaque à une suite...


SHAFT - John Singleton (2000)


Un jeune noir (Mekhi Phifer) est retrouvé mort devant un bar branché de New York. John Shaft (Samuel L. Jackson) se retrouve sur l'affaire et arrête le principal suspect : Walter Wade Jr. (Christian Bale), le fils d'un riche promoteur immobilier. Excédé par les remarques racistes du jeune milliardaire, Shaft le frappe et se fait suspendre alors que Wade est libéré sous caution...

Deux ans plus tard, Shaft a été muté aux stups, dans un commissariat de Harlem. Avec son équipe, il mène un guerre contre les dealers. Mais lorsqu'il est informé du retour de Wade sur le sol américain, Shaft le cueille à sa descente de l'avion ; mais lorsque celui-ci est à nouveau libéré, Shaft démissionne sur les conseils de son oncle (Richerd Roundtree) et décide de faire les choses à sa manière !

D'autant que lors de son bref séjour en prison, Wade a fait la connaissance d'un caïd de Harlem : Peoples Hernandez (Jeffrey Wright). Les deux hommes trouvent vite leurs intérêts à s'allier pour empêcher se venger de Shaft...

On peut juger de deux points de vue ce film ; d'une part en tant que film policier d'action moderne. D'autre part, en tant que remake (ou plus exactement le spin-off) de Shaft, LE film emblématique de la blaxploitation, qui sauva la MGM de la faillite et qui rassembla les talents du réalisateur Gordon Parks, de l'acteur Richard Roundtree et du "Black Moses" Isaac Hayes.

En tant que film d'action, il n'y pas grand chose à reprocher :  courses poursuites à travers New York, bastons à main nue ou au couteau, méchants savoureusement allumés... Et là où l'on pouvait reprocher à la série TV Shaft d'avoir mis la pédale sur la violence, on a ici des fusillades bien sanguinolentes. Cependant, on aurait pu attendre mieux de John Singleton, capable de livrer un Boyz N the Hood comme un 2 Fast 2 Furious.
La réussite au box office est d'ailleurs éclatante, avec plus 100 millions de recette (pour un budget assez important de 46 millions).

Pour ce qui est de l'affiliation à la franchise originale, elle me laisse sur ma fin. Le "père" de Shaft, le photographe et réalisateur Gordon Parks, donne pourtant son onction au film, en faisant un rapide caméo dans un bar connu de Harle. Idem pour Richard Roundtree qui reprend le rôle du John Shaft "historique" qui vient prodiguer ses conseils à son neveu.
L'idée originale de Singleton était d'en faire son fils, et de mettre les deux en vedettes ; mais les producteurs ne l'ont pas suivi ; pas plus qu'ils n'ont accepté Don Cheadle comme acteur principal.
Samuel Jackson s'en tire finalement très bien et, légèrement plus violent que son prédécesseur, il en affiche la non-chalance et la classe. Il s'avère en plus un allié de John Singleton face aux producteurs prêts à dénaturer le personnage... Le résultat ne lui a pas plu et il refuse de rempiler pour d'autres opus (dont un devant être, semble-t'il, confié à Richard Roundtreer lui-même pour le réaliser !)

En somme, on passe un bon moment devant ce film d'action... si l'on parvient à oublier que nous sommes face à la version modernisée de Shaft ! Et j'imagine que les fans de films d'action regrettent, eux, les "hommages" à la blaxploitation.

Christian Bale campe un affreux petit arriviste mais est l'autre méchant lui fait de l'ombre : Jeffrey Wright, qui se fait remarquer dans son rôle de caïd
Pour le reste, ça fourmille de seconds rôles plus ou moins réussis : l'ex Miss America Vanessa Williams (Soul Food, Hoodlum, personnage central des dernières saisons de Desperates Housewives), Mekhi Phifer (à jamais associé au Docteur Pratt de Urgences), Ruben Santiago-Hudson (Coming to America, American Gangster et les séries Law & Order et Castle), Stu "Large" Riley (Woo, The Best Man, The Adventures of Pluto Nash), le rapeur Busta Rhymes (plutôt rare sur les écrans : Who's the Man ?), Gano Grills (Ghost Dog, Gangsta Cop, Bamboozled, Marci X), Sonja Sohn (Slam, la série géniale The Wire), Lanette Ware (Pootie Tang, Bad Company)  le rapeur Bonz Malone (Slam, Life et Brooklyn Babylon), le footballeur Lawrence Taylor...

samedi 11 août 2012

Décès de Al Freeman Jr.

Albert Freeman Jr. est mort à 78 ans, ce vendredi 9 Août.

Acteur puis enseignant, il a débuté dans le cinéma quand les Noirs y étaient encore rares. Bien sûr, ses premiers rôles furent d'insignifiants garçon d’ascenseur, chauffeur de taxi et autre serviteur. Son premier vrai rôle, il le décroche le rôle d'un militant dans un film progressiste : Black Like Me (l'adaptation du livre de John Howard Griffin, Dans la peau d'un Noir).
Puis il décroche enfin un premier rôle dans Dutchman, écrit par Amiri Baraka. Il joue des rôles de soutien auprès de Frank Sinatra dans Le Détective, et de Fred Astaire et Petula Clark dans La Vallée du Bonheur ou de Sidney Poitier dans The Lost Man. (d'ailleurs pour la petite histoire, Freeman jouer le rôle de Poitier dans la comédie musicale adaptée de Lilies of the Field)
En 1971, il se lance dans la réalisation avec A Fable, un film malheureusement introuvable.
Etonnament Al Freeman Jr. "échappe" à la vague blax' et prend plutôt le chemin des séries comme Hot L Baltimore et surtout la série télévisée One Life to Live grace à laquelle il décroche l'Emmy Howard du meilleur acteur en 1979. Il est le premier Afro-Américain à obtenir ce prix !

La même année, dans Roots : The Next Generations, il incarne le leader Malcolm X (dans la période précédent son assassinat, lorsqu'il travaille à sa biographie avec Alex Hailey, interprété par James Earl Jones). Treize ans plus tard, ce n'est donc pas sans raison que Spike Lee lui confie le rôle d’Elijah Muhammad dans son Malcolm X. Nouvelle récompense, cette fois plus politique : la NAACP « Image Awards for achievement in the arts and entertainment ».
Après de sporadiques apapritions dans diverses séries, il tire sa révérence à la caméra de Maya Angelou dans Down in the Delta. Il se consacre ensuite à l'enseignement du cinéma et du jeu à l'Howard University de Washington.

C'est une part du cinéma afro-américain qui s'en va...