jeudi 5 mai 2011

Classified X

Co-produit pas Arte, Classified X est incontournable pour qui s'intéresse au cinéma et/ou aux combats des Afro-Américains...

CLASSIFIED X - Mark Daniels (1998)
A sa sortie, Sweet Sweetback... fut classé "X" par la Motion Picture. Melvin Van Peebles leur adresse une lettre où il précise : "En tant qu'artiste noir et que producteur de films indépendants, je refuse de soumettre ce film, réalisé dans une perspective noire pour les Noirs, à l'attribution par la Motion Picture d'un code de classement qui serait applicable à la communauté noire. [...] Je récuse à votre organisme de classement des films le droit de dire à la communauté noire ce qu'elle doit voir ou pas. Que le reste de la population se soumette à votre censure, c'est son affaire mais les standards blancs ne doivent plus désormais être imposés à la communauté noire."
Non seulement Van Peebles se sert de ce classement, normalement infamant, pour promouvoir son film mais il pose aussi la question des stéréotypes véhiculés par Hollywood dans ses films, qui eux n'ont jamais été censuré. En 1998, il développe cet argument en présentant dans ce documentaire ces films et ces figures stéréotypées, offensantes et caricaturales des Afro-Américains.

Malgré son amour pour le cinéma (comme on peut le voir dans la scène d'ouverture ci-dessous), il décrit la difficulté pour un jeune Afro-Américain du milieu du XXème siècle pour voir des personnages noirs positifs. Partant il décortique l'imposition dans le cinéma hollywoodien des personnages noirs, objet de dérision ou de peur, évoquant The Birth of a Nation de D.W. Griffith et The Jazz Singer. Il critique les minstrel shows et les cartoons racistes aux Blancs grimmés ou aux caricatures grossières de mangeurs de pastèques et autres musiciens génétiquement programmés...

Plus rare, il parle aussi des "race movies" indépendants d'Oscar Micheaux et Spencer Williams. Puis vient la généralisation de l'Oncle Tom moderne, le personnage noir sympathique et courageux... qui meurt donc le premier dans les films de guerre et d'action (à l'image de Spartacus ou The Dirty Dozen) ou s'avère le gendre asexué plus-que-parfait.
La période de la blaxploitation est rapidement évacuée, Van Peebles peinant à en masquer sa détestation. Ainsi que le renouveau des années 90 ; il évoque juste Spike Lee, John Singleton et Julie Dash, et les films Malcolm X et Panther.



Appréciable et percutant dans son propos, ce documentaire est abordable par tous et fait véritablement œuvre de pédagogie.
On peut regretter que le DVD ne soit pas accompagné de sous-titres. Tout comme il est regrettable qu'Arte, pourtant active dans la diffusion de bons films et documentaires sur le sujet, n'est jamais montré à ma connaissance cet excellent docu.
La réalisation et la mise en scène sont plutôt réussies, évitant les plans fixes du narrateur sur son fauteuil. Melvin se ballade dans New-York, ou apparaît en surimpression devant les films qu'il commente.
Bien sûr, sa légère mégalomanie le pousse à envisager que le seul bon film réalisé sur les Afro-Américains est le sien. Mais sa critique de la blaxploitation est pour une large part exagérée : même si la récupération et la "trahison" de Sweetback... est évidente, Van Peebles réduit le phénomène, tel un journaliste prenant ses infos sur Wikipedia, à quelques films , alors que l'ère du soul cinema est riche de centaines de productions de qualité inégale (dont le sublime Ganja & Hess et les très politiques The Spook Who Sat By the Door et The Final Comedown par exemple) mais d'une diversité incroyable.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Excellent doc et désolé de vous contredire ,Arte a bien diffusé ce doc à l'époque (je l'ai en vostfr)mais, à ma connaissance,il n'a jamais été rediffusé