samedi 23 juin 2012

...

Petite pause dans la publication des chroniques. Profitez-en pour vous replonger dans les comédies afro-américaines des années 2000, ou les rares mais très bonnes comédies françaises "noires".
Je reprends les publications à partir de mi-juillet, avec ce qui faisait la raison première de ce blog : la blaxploitation ! On commencera avec un dossier complet sur le détective privé mythique John Shaft (la trilogie des 70s, la série et le remake) puis différents soul movies. Pour la rentrée de septembre, je décortiquerai la filmo de deux stars de la blax : Jim Kelly et Jim Brown...
Stay Black !

mercredi 20 juin 2012

Case Départ

Dernière chronique sur les comédies françaises "noires" et changement de décor pour cette fable humoristique qui aborde un thème des plus casse-gueules : l’esclavage...



CASE DEPART - Thomas Ngijol,
Fabrice Eboué & Lionel Steketee (2011)


Conseiller municipal marié à une blanche et père d'une petite fille, Régis Grosdésir (Fabrice Eboué) fait tout pour oublier et faire oublier ses origines antillaises. Sorti fraîchement de prison, son demi-frère Joël (Thomas Ngijol) vit encore chez sa mère et offre un bien piètre exemple à sa fille... Les deux homme que tout oppose sont pourtant réunis à la Martinique, pour la mort de leur père, espérant un héritage conséquent. Pour tout legs, ils se retrouvent avec le certificat d'affranchissement de leurs ancêtres. Dépités les frères le déchirent, provoquant l'ire d'une vieille tante qui les envoie en 1750.
Capturés puis vendus comme esclaves, renommés Gaspard et Gédéon, ils doivent couper la canne dans la plantation de M. Jourdain, sous les ordres du sadique contremaître M. Henri (David Salles). Joël et Régis s'adaptent comme ils peuvent et rencontrent leurs ancêtres Isidore et Rosalie (Eriq Ebouaney & Stefi Celma)...

Passer d'un succès télévisuel au grand écran, beaucoup s'y essayent. Rare sont ceux qui transforment l'essai ! Rajoutez à ça un thème casse-gueule tant la critique et les médias ne laisseront passer aucun faux-pas sous prétexte de lutter contre le "communautarisme". Thomas Ngijol et Fabrice Eboué se tire très bien de ce premier long métrage ! Ils manient un humour ciselé, souvent noir et parviennent à faire rire tout en traitant vraiment de l'esclavage et des problèmes d'identité dans la société française.

C'est même une véritable performance d'équilibristes que réalisent les deux comiques. Ils concentrent les rires sur eux-mêmes, tandis que tout autour répond à un soucis de réalisme. De la représentation du quotidien des plantations, au marché aux esclaves en passant par le petit monde autarcique de la famille de planteurs, le tableau esquissé répond à une volonté de réalisme des réalisateurs/comédiens.
On sent que Ngijol et Eboué ont travaillé, lu des ouvrages sur l'esclavage, regardé des films (on ne peut s'empêcher de penser à Roots lors des scènes où ils tentent d'échapper aux chaînes, courant à travers champs et forêts). Il en ressort sans conteste un film comique maniant avec subtilité l'humour décalé et présentant un tableau crédible de l'esclavage dans les Antilles françaises.

Quelques ressorts restent pour moi assez obscurs (comme le gimmick récurrent du contremaître), mais c'est peu face au reste. La scène où ils discutent avec un commerçant juif qui les cache est un exemple de l'humour ciselé et corrosif qui fait la force du film et le met à l'abri des critiques les plus réacs.

Le DVD vaut vraiment le coup. Il comporte des scène coupées, dont certaines vraiment tordantes et d'autres plus sérieuses, un "bêtisier" plus intéressant que la normale et un making of très complémentaire du film où les deux jeunes auteurs  précisent leurs intentions (et qui est venu confirmer mes appréciations du film). On peut y voir le troisième réalisateur, plus expérimenté, Lionel Steketee (par exemple assistant de réalisation sur Hotel Rwanda).

L'essentiel du casting est composé de figurants cubains, et les seconds rôles sont confiés pour la plupart à des actrices et acteurs peu connus, bien que très convaincant. En particulier pour David Salles qui incarne un parfait contremaître retord et violent. Idem pour Michel Crémadès, dont la séquence représente parfaitement l'humour millimétré voulu par Eboué et Ngijol.
On peut citer aussi Jean-Claude Duverger (30° couleur) ou Eriq Ebouaney qui incarna Lumumba dans le film éponyme de Raoul Peck.
Bien entendu, il y a aussi quelques membres de la bande du Comédie Club (Blanche Gardin, Wahid Bouzidi et Youssoupha Diab) ainsi que le rapeur old school Doudou Masta et sa voix de stentor qui campe un chef de neg'marrons.

vendredi 15 juin 2012

La première étoile

Dans un tout autre style qu'Antilles sur Seine ou Case départ, l'acteur Lucien Jean-Baptiste passe derrière la caméra pour mettre en image un souvenir d'enfance...

LA PREMIERE ETOILE - Lucien Jean-Baptiste (2009)



Jean-Gabriel (Lucien Jean-Baptiste) n'est pas un bourreau de travail et squatte un peu trop le PMU du quartier. Sa femme Suzy (Anne Consigny) est fatiguée de gérer les enfants et les écarts de son mari...
Un soir, pour faire plaisir à sa fille, Jean-Gabriel fait une promesse à la va-vite : emmener toute la famille au ski. Mais Suzy n'en peut plus de ses enfantillages irréfléchis, elle le menace de tenir sa promesse sinon elle le quittera !
Pour y arriver, Jean-Gabriel se débrouille comme il peut ; il emprunte la voiture de son pote Jojo (Edouard Montoute), prépare les valises de ses gosses et convainc sa mère (Firmine Richard) de les accompagner, dans le secret espoir que celle-ci s'occupera de l'intendance et des tâches ménagères...

Ceux qui s'attendait à une déclinaison des Bronzés font du ski à la sauce antillaise en sont heureusement pour leur frais (et sont d'ailleurs des plus virulents dans leurs commentaires sur le net).
Avec plus de 1,6 millions d'entrées et une nomination aux Césars 2010 dans la catégorie "Meilleure première œuvre", La première étoile remporte un joli succès, bien qu'encore une fois, il faut se rendre à la triste évidence, la France n'était toujours pas apte à recevoir positivement une comédie aux protagonistes noirs ! D'autant plus s'ils sont proches d'une certaine "normalité".

Malgré une erreur sur l'affiche et le pitch qui traduisent bien mal l'ambiance du film (problème que l'on retrouve avec Antilles sur Seine), Lucien Jean-Baptiste fait la preuve que l'on peut faire une comédie avec -et par- des Noirs qui ne soient pas une succession de caricatures. En outre, Jean-Baptiste traite avec humour d'un sujet ordinaire et très crédible. Et, si le racisme est évoqué, il n'est pas au centre du film qui s'intéresse en fait à une famille allant au ski pour la première fois, et le choc culturel n'est pas dû à la couleur des protagonistes, mais bien à leurs habitudes et leurs finances. Il n'est pas inutile de rappeler que 9% seulement des Français pratiquent les sports d'hiver
On s'attache à cette petite famille, à ce père pas assez adulte, à cette grand-mère forte en gueule et à ses gamins émerveillés par cette première expérience. Une chose est claire, Lucien Jean-Baptiste parvient à donner une âme à son film, à l'image de la très jolie scène où la petite Loreyna Colombo (doublée par Ondine Savignac) dans son interprétation de La montagne.

Ainsi Lucien Jean-Baptiste réalise là une des premières comédies françaises avec au centre une famille noire dans son quotidien, là où les américains font ça depuis 40 ans. D'ailleurs pour la petite histoire, Lucien Jean-Baptiste assure la voix française de dizaines d'acteurs afro-américains et double de manière récurrente Don Cheadle, Will Smith, Martin Lawrence, Jamie Foxx, Ice Cube, Omar Epps, Marlon Wayans ou Chris Rock. Sympathique hasard, Chris Rock a acheté en 2010 les droits pour adapter le film aux Etats-Unis.

Découverte dans Romuald et Juliette, Firmine Richard est tout simplement parfaite dans une composition juste et sans excès. Edouard Montoute fait une petite apparition comique, et Bernadette Lafont et Michel Jonasz campent un couple de montagnards avec leur travers, mais rempli d'humanité (un peu trop d'ailleurs, ce qui rend parfois leurs personnages patauds).

R.I.P. Yvette Wilson

Jeune actrice dans d'importants films des années 90s comme Poetic Justice, House Party 3, Friday, Blankman et Don't Be a Menace... Elle s'était vraiment fait connaître dans le sitcom Moesha (reprenant le rôle de Andell Wilkerson dans le spin-off The Parkers).
Elle est décédée le 14 juin, des suites d'un cancer...

lundi 11 juin 2012

Antilles sur Seine

Commençons notre exploration des rares comédies françaises réalisées et jouées par des Noirs. Très sous-estimé, cet Antilles sur Seine est pour moi un petit bijoux tant il regorge de détails qui lui confèrent presque un label "Black Power"...

ANTILLES SUR SEINE - Pascal Légitimus (2000)

Horace Ste Rose (Med Hondo) est le mère de Grand-Bourg, la capitale de Marie-Galante, dont les terrains sont convoités par des promoteurs sans scrupule. Et lors d'un voyage à Paris, sa femme est kidnappée. La rançon ? Elle consiste bien sûr à céder les terrains en question.
Les fils Ste Rose, Freddy et Manuel (Edouard Montoute & Thierry Desroses), un animateur d'une radio locale et un chirurgien de la Salpétrière, se rendent auprès de leur père. Les trois hommes décident de prendre les choses en main et débarquent à Paris.
L'enquête est confiée au lieutenant Herman (Chantal Lauby), mais sa hiérarchie freine ses  recherches.
Un ancien agents des RG, Gertrude Boisec (Georges Mathieu) apporte sa précieuse aide aux Ste Rose et leur assure le soutien de la communauté antillaise de la capitale, des policiers aux balayeurs, des professions hospitalières aux postiers, des personnels d'EDF-GDF aux conducteurs de métro...

Le casting est alléchant, mais le scénario et la réalisation sont très basiques. Pourtant, Pascal Légitimus signe un film vraiment réfléchi, aux références multiples et derrière une comédie apparemment bon-enfant, on peut découvrir un manifeste pour une juste représentation des Noirs à l'écran et une ode à la solidarité communautaire.
Rien de manichéen cependant : il y a des bons et des méchants, des riches et des pauvres, des salauds comme des altruistes, des rigolos et des sérieux... bref tout sauf les bénis-oui-oui comiques ou gros bras qui servent de faire-valoir (même lorsque le propos relève d'un anti-racisme bon teint) aux quelques productions audiovisuelles françaises qui "utilisent" des actrices et acteurs de "couleur".
Malgré tout, le film peine à dépasser 500 000 milles entrées. D'abord, il faut bien avouer que l'affiche comme la bande-annonce ne donnent pas envie (mais surtout elles sont à des lieues de ce que propose le film) ; la cause de ce succès mitigé, c'est plutôt que la France n'était pas prête à transformer une comédie présentée comme "communautaire" en succès. Dommage !

Artisan principal de ce projet, et dans la lignée des grands réalisateurs afro-américains de Van Peebles à Spike Lee, Pascal Légitimus tient presque toutes les rennes et porte les casquettes de réalisateur, scénariste, acteur et compositeur (et comme eux, s'entoure de sa famille : avec son père Théo bien sûr, et les musiciens Clément et Dominique).
Et, comme les grands comédiens Richard Pryor, Eddie Murphy ou Martin Lawrence, Légitimus campe plusieurs personnages : un animateur de radio, le grand-père Ste Rose, un chauffeur de taxi, une postière et une concierge blanche. Ces personnages sympathiques sont par moment caricaturaux, mais il est utile de noter que c'est l'artisan principal du film qui les concentre sur lui-même, comme pour en conjurer les méfaits.

Le casting est composé de quasiment tout ce que la télévision et le cinéma français compte d'actrices et acteurs noirs : Edouard Montoute, Thierry Desroses, Jacques et Jean-Michel Martial, Greg Germain, Laure Moutoussamy, Lucien Jean-Baptiste, Ricky Tribord, Anthony Kavanagh, Mylène Wagram, Otis Ba ou encore Luc Saint-Eloy, un acteur "black listé" après ses prises de position publique durant une cérémonie des Césars.
Le rôle principal est confié à Med Hondo, originaire d'Afrique, réalisateur, acteur de cinéma, de télé et de théâtre, il est -malheureusement- connu de tous pour sa voix, puisqu'il double depuis 30 ans le comique Eddie Murphy dans les versions françaises ; on peut -et on doit absolument !- le voir aux cotés de plusieurs membres de la famille Légitimus dans Les verts pâturages. Légitimus exploite à fond cette injustice artistique en lui offrant un rôle respectable d'homme combattif d'une part, et en lui faisant doubler avec "sa" voix de Murphy un chauffeur de taxi (scène que partage plus bas).
Dans une autre scène sont réunies plusieurs autres voix comme célébrissime Maïk Darah (qui double Whoopy Goldberg ou Monica dans Friends.

Il y a aussi pas mal d'acteurs blanc. Bien entendu ses accolytes des Inconnus : Bernard Campan et Didier Bourdon, ainsi que Daniel Russo, Georges Mathieu, Serge Riaboukine, Hélène Vincent...  et, plus étonnant le duo comique Chevallier et Laspalès. Quant à Chantal Lauby, elle apporte son coté décalé qu'on lui connaît et son duo avec son subordonné souffre-douleur, incarné par Pierre-Olivier Mornas, fonctionne à merveille !

Le guest des guests c'est Melvin Van Peebles, le père du cinéma indépendant afro-américain et précurseur, à son corps défendant de la blaxploitation. Avec cette apparition, c'est plus qu'un clin d’œil que fait Légitimus, c'est l'affirmation de sa démarche artistique et l'affirmation d'une filiation. Même si on est loin de l'aspect politique du révolutionnaire Sweet Sweetback..., convoquer Van Peebles n'est pas anecdotique. Ainsi, et pour conclure, Pascal Légitimus profite de sa renommée pour essayer de créer un cinéma des Noirs de France, un cinéma qui offre de vrais rôles aux actrices et acteurs "de couleur".
Pour cela rien n'est laissé au hasard dans cette comédie faussement gentillette où chaque micro-détail est calibré pour rendre hommage au travail des actrices et acteurs noirs et plaider en faveur d'une meilleure représentation de ce que Luc Saint-Eloy appellait "les minorités visibles".

dimanche 10 juin 2012

Comédies françaises "noires"

La France est toujours décalée par rapport aux Etats-Unis. Lorsqu'il s'agit du système de santé ou de la "guerre contre le terrorisme", c'est toujours bon à prendre... mais pour ce qui est de la représentations des "minorités visibles", il faut bien avouer que les productions hexagonales affichent un retard considérable !

Les Noirs et Arabes de France et les Afro-Américains n'ont certes pas des parcours similaires, liés à l'histoire coloniale pour les et à l'esclavage pour les autres. Le racisme s'y décline donc de manières différentes, de même que les résistances, les combats pour l'égalité et l'expression des cultures "minoritaires".
D'un point de vue audio-visuel, les Afro-Américains ont réussi à imposer leur présence à l'écran, la diversité des rôles et des histoires et une autre "normalisation" que la culture WASP ; ils ont créés et/ou trouvés des débouchés à leurs productions, en direction de leur communauté pour certaines, à vocation plus universaliste pour d'autres. Mais toujours est-il que chaque genre cinématographique est investi par les Afro-Américains, et à tous les niveaux de la production.

En France, les Noirs (et les Arabes) sont cantonnés aux seconds rôles, aux flics débonnaires ou aux "racailles" plus ou moins sympathiques. Aucune actrice ou aucun acteur noir n'arrivent à la renommée d'un Depardieu ou d'une Deneuve... et le César de Omar Sy, pour intéressant qu'il soit, n'est que l'arbre qui cache la forêt.
Quand les films urbains étaient en vogue outre-Atlantique, on a eu droit en France à des équivalents comme La Haine, Ma 6-T va crack-er ou Raï. Mais le phénomène est resté très limité et étrangement déconnecté des réalités des quartiers populaires.
Même du coté des comédies, la place est dure à prendre pour des réalisateurs noirs qui souhaitent éviter les clichés et proposer une autre vision. Quatre titres sortent du lot : Antilles sur Seine, une comédie géniale mais sous-estimée de Pascal Légitimus en 2000. Case Départ, une comédie décalée sur l'esclavage signée des amuseurs Thomas Ngijol et Fabrice Eboué. Quant à Lucien Jean-Baptiste, il semble s'imposer tranquillement avec deux films en quelques années : La première étoile et 30° Couleur.


J'en profite pour faire la publicité pour Les Noirs dans le cinéma français, le dernier livre de Régis Dubois (en vente ici) :

samedi 9 juin 2012

Le prochain Tarantino...

Tarantino aime la blaxploitation et le cinéma bis, c'est connu.Après l'ode à Pam Grier dans Jackie Brown, le projet Grindhouse et une sorte de remake d'Inglorious Bastards (de 1978, avec Fred Williamson), il s'attaque au western...

Produit par Reginald Hudlin, Django Unchained met en vedette un chasseur de prime et un esclave (Christoph Waltz & Jamie Foxx) qui collaborent contre un propriétaire terrien machiavélique joué (par Leonardo DiCaprio). Ce casting impressionnant sera complété par Samuel L. Jackson et Kerry Washington, RZA (après les désistements de Kurt Russell et Sacha Baron Cohen).

La sortie française est annoncée pour le 16 janvier 2013, un mois après les Etats-Unis.
On a hâte !

jeudi 7 juin 2012

Comédies des 2000s : conclusion

La décennie de comédies afro-américaines s'ouvre sur un documentaire de Spike Lee sur quatre grands comiques réunis dans le spectacle The Original Kings of Comedy.
Force est de constater que les choses ont bien avancé depuis les années 70 et le phénomène de la blaxploitation puis le recul des 80s ; on assiste plutôt la confirmation de la tendance amorcée dans les années 90 qui va vers une "normalisation" des rôles afro-américains. Ainsi, bonnes ou mauvaises, ces comédies semblent avoir délaissé les bouffons noirs asexués. Et, si l'on retrouve ça et là quelques vieilles caricatures, et la recette facile du buddy movie inter-racial (Bronx à Bel Air, Showtime, National Security, I Spy et The Man), celà ne représente plus qu'une petite part des productions et des succès au box office.
Le nombre de films s'est considérablement accru, ainsi que la part des Afro-Américains dans la production ou la réalisation. Le sous-genre le plus prisé s'impose comme la comédie sentimentale.

Comédies sentimentales
A l'intérieur du genre "comédies", se développe un véritable sous-groupe très lucratif : la comédie romantique. Pas une année sans deux ou trois gros titres relevant de cette alchimie bien dosée entre humour et romance. Atteignant le rang de film culte, Two Can Play That Game ouvre la voie. Puis des dizaines se succèdent reprenant souvent les mêmes ingrédients, voire les mêmes acteurs : The Ladies Man, Kingdom Come, Bringing Down the House, The Fighting TemptationsBreakin' All the Rules, Are We There Yet ?, Guess Who, The Honeymooners, Last Holiday, Phat Girlz, Three Can Play That Game, Who Made the Potatoe Salad ?, The Perfect Holiday, This Christmas, Love For Sale, 

Quelques uns sortent du lot comme Deliver Us from Eva qui offre enfin un vrai rôle à Gabrielle Union, I Think I Love My Wife (remake par Chris Rock d'un film d'Eric Roehmer) ou le déjanté She Hate Me signé Spike Lee.

And Tyler Perry is coming...
Le phénomène de ces années 2000 est incontestablement Tyler Perry, acteur, réalisateur et scénariste. Il livre plus d'une dizaine de films dont la plupart sont des comédies dramatiques avec fil conducteur le personnage d'une grand-mère allumée autant que moraliste, Madea. Elle débarque dans Diary Of A Mad Black Woman puis revient à rythme quasi annuel dans Madea's Family Reunion, Meet the Browns, Madea Goes to Jail, I Can Do Bad All By Myself, Madea's Big Happy Family
Deuxième franchise à succès Why Did I Get Married ? et Why Did I Get Married Too ? rassemble Janet Jackson, Tasha Smith ou Michael Jay White.
La comparaison avec Spike Lee me paraît pertinente, et légèrement provocatrice quand on sait l'animosité qui règne entre les deux. Non pas que Perry en ait le talent (je pense au contraire qu'il en est loin d'en avoir la finesse et les qualité de cinéaste), mais leurs parcours pour percer dans l'industrie cinématographique montrent des similitudes. D'abord par les moyens de production : de petits films indépendants, mais avec des succès financier et d'estime (auprès de publics différents cependant). Ensuite, Perry fait évoluer ses films dans un petit monde bien délimité : la bourgeoisie afro-américaine, qu'il traite avec des angles de prédilection : les drames conjugaux, la violence, la famille, la maltraitance, la maladie...
Enfin comme Spike Lee, Tyler Perry s'adjoint une bande avec laquelle il travaille de façon presque continu : de la ribambelle d'actrices et d'acteurs connus (dont certains représentent un morceau de l'histoire artistique afro-américaine) jusqu'à certains figurants -en particuliers chanteurs et musiciens- en passant par une équipe technique resserrée.

Sport

Les années 2000 font aussi la part belle aux comédies sportives. Le basket se place bien en tête avec Juwanna Man, Like Mike et sa séquelle, The Cookout, Rebound, Frankenhood, Just Wright... mais l'on retrouve aussi le base ball avec Mr. 3000, le football -l' "américain" bien sûr pas le soccer- avec The Longshots (film très agréable sur fond de chômage et de crise industrielle, qui permet de découvrir la jeune Keke Palmer), le roller comme hobby de la jeunesse afro-américaine dans les très bons Roll Bounce et ATL, et même le golf avec Who's Your Caddy ?
Barbiers et coiffeuses...
Lancée par Ice Cube et son Barbershop, la mode des films de salon pour hommes ou femmes explosent (et retombe tout aussi rapidement).
En deux ans, plusieurs films sortent mettant en scène coiffeuses et barbiers : Hair Show, Barbershop 2 : Back in Business, Nora's Hair Salon, Beauty Shop, The Salon avec en tête d'affiches des actrices et acteurs banckable comme Mo'Nique, Ice Cube, Jenifer Lewis, Queen Latifah ou Vivica A. Fox.
Malgré leur redondance et leurs irrégularités, ces films mettent la loupe sur un lieu central de la socialisation afro-américaine. En 2009, Chris Rock consacre même un très bon documentaire sur les problématiques capillaires : Good Hair.

Les femmes arrivent enfin !
Si l'on excepte Whoopi Goldberg dans les 80s, les femmes n'avaient que des rôles subalternes dans les comédies black... et par là-même, bien que connues et talentueuses, les actrices afro-américaines étaient cantonnées aux rôles d'épouses et/ou de bombes sexuelles.
Avec les comédies sentimentales qui se développent, nombres d'actrices arrivent sur le devant de la scène : Gabrielle Union, Jada Pinkett Smith, Vivica A. Fox, Queen Latifah, Zoe Saldana, Mo'Nique... toutes ces excellentes actrices ont souvent commencé dans des seconds rôles plus ou moins dénudés, les années 2000 leur offrent des seconds rôles conséquents (mettant souvent en avant leur charme, mais ne les limitant pas à ça) et des premiers rôles forts et jusqu'alors inédits. The Longshots propose même de déconstruire les genres en donnant la vedette à une adolescente douée au football et qui s'impose dans une équipe de mecs !

C'est aussi le tour des réalisatrices. Bien qu'encore limité, le phénomène est notable. Et leur travail est indéniablement différent, proposant un autre regard sur la sexualité et une autre représentation des femmes. C'est le cas de Jennifer Sharp et Nnegest Likké, à qui l'on doit respectivement I'm Through with White Girls (The Inevitable Undoing of Jay Brooks) et Phat Girlz.
Dans un tout autre style, Kasi Lemmons réalise un très intéressant biopic avec Don Cheadle, avec en toile de fond les droits civiques et le black power : Talk To Me.

Hip hop comedies
Bien entendu, la représentation des femmes comme objet sexuel a toujours court, et spécifiquement dans les films hip hop, de The Wash à Soul Plane en passant par How High, The Cookout, Who's Your Caddy ?, The Janky Promoters ou Something Like a Business.
Le problème est que ces comédies, pourtant essentiellement réalisées et:ou produites par des Afro-Américains, concentrent tous les clichés racistes que Hollywood a pratiquement effacé de ses logiciels : le black buck à la sexualité insatiable, les coons fainéants à la démarche non-chalante, les tragic mulattoes aux charmes venimeux et les grosses mamas moralistes.
C'est de mon point de vue le pire constat (et la confirmation d'un processus entamé dans les années 90) : Hollywood a réussi à s'affranchir en parti des stéréotypes séculaires tant dénoncés par les associations antiracistes, les "autorisant" au réalisateurs afro-américains qu'ils produisent.
Cependant tous les projets issu du milieu du rap ne sont pas identiques. Ainsi, le plus abouti de ces films est aussi le moins couteux : Gangsta Rap : The Glockumentary, faux documentaire plus vrai que nature réalisé par Damon "Coke" Daniels.

Encore plus à la marge des comédies hip hop ordinaires, Michel Gondry et Dave Chappelle livrent l'excellent Block Party, sorte de making of d'un énorme concert gratuit réunissant les grands noms du rap US dans les rues de Brooklyn.

Eddie Murphy, valeur (moins) sûre...
Troisième décennie comme tête d'affiche pour Eddie Murphy ! D'un coté, il s'oriente vers des comédies familiales (Dr. Dolittle 2, Daddy Day Care, The Haunted Mansion, Imagine That) et d'un autre reste sur le registre qui a fait son succès, celui du héros aux longues tirades, aux multiples combines et tout de même au grand cœur (Showtime, The adventures of Pluto Nash, I Spy). Autant les premiers sont de relatifs succès (mérités de surcroit), autant ses comédies d'action -où il partage l'affiche avec De Niro ou Owen Wilson- sentent le réchauffé et se traduisent par des échecs cuisants (qui ne remboursent pas leur budget de production). Avec Norbit et Meet Dave, il récidive dans le genre ultra-lourdingue où il incarne plusieurs personnages... Il est à ce sujet intéressant de voir ce qu'en pense son doubleur français, le grand Med Hondo. Non chroniqué ici, le grand succès de Murphy de ces dernières années reste l'âne de Shreck.

Lien
Son "élève" Martin Lawrence marche dans ses pas en jouant dans des comédies d'action répétitives et rarement très inspirées, telles que Le chevalier black, National Security et Big Mamma. Dans ce dernier cas, le concept original -qui arrive à éviter les poncifs attendus- est vite effacé pour produire deux séquelles nullissimes (Big Momma's House 2 et Big Momma : Like Father, Like Son) qui pour le coup n'oublient aucun ingrédient de mauvais goût !
Heureusement, des films comme Welcome Home Roscoe Jenkins, College Road Trip ou Death at Funeral (et même Bad Boys II) viennent rappeler que Martin Lawrence peut jouer autre chose jouer des rôles comiques sans être le bouffons de service...

Parodies et remakes
Acheter un scénario de série ou de film étranger est une pratique répandue à Hollywood, ce phénomène touche aussi le cinéma afro-américain. D'une part, il y a les adaptations assez classiques de séries mythiques comme Starsky & Hutch, Fat Albert et moins connues comme I Spy et The Honeymooners. Bien sûr il y a aussi des remakes de films : Chris Rock s'attaque au réalisateur français Eric Rohmer avec I Think I Love My Wife, il joue aussi dans Death At A Funeral aux cotés de Martin Lawrence, Loretta Devine, Zoe Saldana, Danny Glover et bien d'autres. Kevin Rodney Sullivan propose Guess Who qui revisite, sous une forme inversée et pour le moins maladroite, la comédie culte avec Sideny Poitier : Guess Who's Coming to Dinner.
Signe des temps, il est intéressant de noter que The Honeymooners, Are We Done Yet ? ou encore I Think I Love My Wife sont des remakes où les personnages principaux blancs remplacés par des Afro-Américains.

Du coté des parodies, la famille Wayans est toujours à la manœuvre dans ce sous-genre avec Scary Movie et Scary Movie 2 de Keenen Ivory et Dance Flick de Damien Dante. Le talentueux réalisateur Gary Hardwick fait une tentative dans cette veine, avec l'inégal Universal Remote.
On trouve aussi un nombre conséquent de comédies qui reprennent les codes des soul movies ; c'est le cas du déjanté Pootie Tang, du très cool Undercover Brother et de la déclinaison juive de la blax avec l'étonnant The Hebrew Hammer.
Mention spéciale pour l'excellent Black Dynamite, véritable hommage à la blaxploitation qui dépasse largement le pastiche et reste le projet cinématographique afro-américain de cette dernière décennie !


2000
Bamboozled
Big Momma's House
The Ladies Man
The Original Kings of Comedy
Next Friday
Scary Movie
The Wash

2001
Black Knight
Down To Earth
Dr. Dolittle 2
How high
Kingdom Come
Pootie Tang
Scary Movie 2
Two Can Play That Game

2002
The adventures of Pluto Nash
All About the Benjamins
Barbershop
The Boat Trip
Friday After Next
I Spy
Juwanna Mann
Like Mike
Showtime
Undercover Brother

2003
Baadasssss ! How to Get the Man's Foot Outta Your Ass
Bad Santa
Bad Boys II
Bringing Down the House
Daddy Day Care
Deliver Us from Eva
The Fighting Temptations
The Haunted Mansion
Head of State
The Hebrew Hammer
National Security

2004
Barbershop 2 Back in Business
Breakin' All The Rules
The Cookout
Fat Albert
Hair Show
Mr. 3000
My Baby's Daddy
She Hate Me
Soul Plane
Starsky & Hutch
White Chicks

2005
Are We There Yet ?
Beauty Shop
Block Party
Diary Of A Mad Black Woman
Guess Who
The Honeymooners
Lil' Pimp
King's Ransom
The Man
Rebound
Roll Bounce
The Salon

2006
ATL
Big Momma's House 2
Last Holiday
Little Man
Madea's Family Reunion
Phat Girlz
Who Made the Potatoe Salad ?

2007
Are We Done Yet ?
Daddy Day Camp
Gangsta Rap : The Glockumentary
The Hustle
I'm Through with White Girls (The Inevitable Undoing of Jay Brooks)
I Think I Love My Wife
The Perfect Holiday
Norbit
Talk to Me
This Christmas
Three Can Play That Game
Universal Remote
Who's Your Caddy ?
Why Did I Get Married ?

2008
Be Kind Rewind
College Road Trip
First Sunday
Love For Sale
Meet Dave
Meet The Browns
The Longshots
Soul Men
Welcome Home, Roscoe Jenkins

2009
Black Dynamite
Dance Flick
Frankenhood
Good Hair (Documentaire)
Imagine That
I Can Do Bad All by Myself
The Janky Promoters
Madea Goes to Jail
Next Day Air

2010
Death At a Funeral 
Just Wright 
Lottery Ticket 
Our Family Wedding
Something Like a Business
Speed-Dating
Why Did I Get Married Too ?

2011
35 and Ticking 
Big Mommas : Like Father, Like Son 
Jumping the Broom
Madea's Big Happy Family 

mardi 5 juin 2012

Big Mommas : Like Father, Like Son

Dix ans après le premier volume -qui garde encore un peu de fraîcheur- le troisième volet, Big Mamma: de père en fils, vient confirmer l'essoufflement de la franchise...

BIG MOMMAS : LIKE FATHER, LIKE SON 
- John Whitesell (2011)

Malcolm Turner (Martin Lawrence) est toujours un agent turbulent du FBI. Lorsque son beau-fils Trent (Brandon T. Jackson) est témoin d’un meurtre, Malcolm le protège comme il le peut... c'est-à-dire en le transformant en jeune fille forte prénommée Charmaine tandis que lui-même reprend les habits de Big Momma.
Ainsi accoutrés, les deux hommes mènent leur enquête dans une école d’art pour jeunes filles, dont la promiscuité risque de mettre à nu la couverture de Trent et Malcolm...

Faut-il préciser que cet ultime volet est un gros navet sans intérêt ? Sans doute car les recettes sont imposantes : plus de 80 millions de dollars au box-office, presque trois fois le budget initial ! Le premier opus, Big Momma's House, passait encore pour une comédie légère mais rigolote. Le second, Big Momma's House 2 réalisé par John Whitesell, était non seulement inutile mais surtout affligeant. Ce Big Mommas : Like Father, Like Son du même réalisateur ne présente pas plus d'intérêt et suscite même l'inquiétude de voir la franchise perdurer après Martin Lawrence, avec Brandon T. Jackson en tête d'affiche.
Second couteau rondouillard qui apparaît dans les 90s (Fear of a Black Hat, The Meteor Man, Friday, Don't Be a Menace..., A Thin Line..., B*A*P*S, The Players Club, 3 Strikes, The Fighting Temptations, Animal, Who's Your Caddy ?, The Perfect Holiday), Faizon Love  est probablement le seul à apporter un peu d'humour et de fraîcheur à cette comédie ratée. Mais il n'est pourtant même pas crédité au générique !
Signalons quelques têtes connues comme Sherri Shepherd (Guess Who, Beauty Shop, Who's Your Caddy ?, Madea Goes to Jail, Precious, Think Like a Man), Marc John Jefferies (Friday After Next, Brown Sugar, The Haunted Mansion, Get Rich or Die Tryin', Notorious) et Mari Morrow(How to Be a Player, National Security, Hair Show, Pastor Brown, 35 and Ticking), ainsi que Ramsey Luke, un obscur second rôle qui apparaît dans les volets.