Mais aussi, chose rare pour l'époque, spécifiquement pour un film indépendant, il sort un journal très complet relatant les coulisses de la production.
Sweet Sweetback's Baadasssss Song
Journal d'un film - Melvin Van Peebles
Editions Rouge Profond, Arte Editions, 2004
Ce livre est très complet, tant dans les documents fournis que dans la précision avec laquelle Van Peebles relate les différentes étapes. Il contient en effet une longue introduction (dont je reproduis une partie ci-dessous), le script, le journal de tournage qui fourmille d'anecdotes -que l'on retrouve dans le film Baadasssss ! et les documentaires The Real Deal et How To Eat Your Watermelon in White Company- et les dialogues et divers autres documents. Dans la version française éditée par Arte, le livre est postfacé par Serge Chauvin, Nicole Brenez, Gilles Moëllic et Jean-Baptiste Thoret.
Bref, un livre incontournable pour qui s'intéresse à Melvin Van Peebles et souhaite quelques "clés" pour appréhender Sweet Sweetback's Baadasssss Song.
Bref, un livre incontournable pour qui s'intéresse à Melvin Van Peebles et souhaite quelques "clés" pour appréhender Sweet Sweetback's Baadasssss Song.
« Que voulais-je accomplir à travers le scénario ? Je voulais franchir une étape supplémentaire et virer de mon cul le pied de l'Oppresseur. En réalité je connaissais la réponse à cette question avant même de la poser. [...] Virer de mon cul le pied de l'Oppresseur signifiait, logiquement, virer du cul de tous les Noirs le pied de l'Oppresseur. Cela me semblait être une vérité évidente, mais beaucoup de nos Frères, les plus "bourges", ne semblent pas le réaliser. Ils n'ont pas l'air de comprendre qu'aussi longtemps que leurs autres Frères seront maintenus en esclavage, eux-mêmes ne seront jamais libres. (S'ils acceptaient de mettre de coté, de temps en temps, leurs grosses limousines pour prendre le taxi, la vérité leur sauterait rapidement aux yeux.)Passons. Prochaine étape : comment, concrètement, virer de notre cul le pied de l'Oppresseur ? La première des bataille à mener, la première des choses que nous devons faire consiste à reconquérir nos propres âmes. Le plus grand obstacle à la Révolution Noire aux Etats-Unis, c'est notre susceptibilité, conditionnée par le programme de l'homme blanc. Simplement, le fait est que l'homme blanc a colonisé notre esprit. Nous avons été violés, déroutés, et sucés par cette colonisation et ce génocide, brutal et calculé. Le racisme le plus violent et le plus évident s'est développé... Voilà dans mon esprit le point de départ. Ma première intention était d'inverser ce processus de colonisation, ce qui m'a fait devenir un putain de cinéaste de premier plan.
"Où sont nos Frères et Sœurs de couleur ? " je me demandais. ils sont en train de sucer la télévision, les films et la musique. Mais la télévision était hors-jeu. A ce niveau, et comme elle était pratiquée aux Etats-Unis, la télévision n'était pas un outil approprié pour diffuser des idées vraiment pertinentes à l'attention des citoyens privés de leurs droits. Le cordon ombilical reliant les programmes de télévision aux annonceurs était court mais vital, et il pouvait être brusquement coupé dans le cas d'un programme risquant de de mettre en avant des idées subversives. Artistiquement, il faut aussi entrer dans la guérilla. Chaque projet doit être financièrement indépendant sans quoi il sera sujet à d'inévitables et scandaleuses pressions économiques, racistes.
Concernant l'histoire, pourquoi ne pas aller droit au but ? Comme mon souhait est de virer de notre cul collectif le pied de l'Oppresseur, pourquoi ne pas faire un film sur un Frère qui serait en train de virer de son cul le pied du Blanc ? »
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