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vendredi 21 mars 2008

Sweet Sweetback's Baadasssss Song

Sorti le 31 mars 1971 au Grand Circus Theater de Detroit, ce film est le fruit d'un véritable combat de Melvin Van Peebles et son équipe contre les studios hollywoodiens, le racisme et la ségrégation et la censure...


SWEET SWEETBACK'S BAADASSSSS SONG
Melvin Van Peebles (1971)

Sweetback (Melvin Van Peebles) travaille dans un club libertin, où il fait le spectacle et donne de sa personne. Son surnom, il le tient de ses précoces prouesses sexuelles. Son patron, Beatle (Simon Chuckster), le "prête" à deux flics qui cherche un Noir à coffrer quelques jours... le contrôle devait être de routine, mais sur la route du commissariat, une émeute éclate et les deux inspecteurs arrêtent Mu-Mu (Hubert Scales), le chef d'un groupe d'activistes. Dans un coin sombre, ils le passent à tabac ; mais Sweetback ne se résout pas à être le témoin passif de ces violences et tue les deux flics.
S'engage alors une cavale à travers la ville où Sweetback trouve de l'aide auprès d'anciennes conquêtes, d'un prêtre iconoclaste (West Gale) et d'autres membres de la communauté. Il cherche à gagner le Mexique, synonyme de liberté, et traverse les étendues désertiques, croisant sur sa route des Hell's Angels, des flics, des rednecks ou des hippies...

Accompagné de la mention "X", le film sort sur quelques écrans en avril 1971 ; Melvin Van Peebles en fera un argument publicitaire, apposant sur l’affiche : "Rated X by an all-white jury". La Bande Originale est composée par Van Peebles, et -précurseur en la matière- il en offre l’interprétation à un groupe funk : Earth, Wind and Fire. Non seulement il la commercialise, mais il se sert de la promotion du disque pour faire la publicité de son film (dont la classification "X" le place en dehors des circuits de promotions ordinaires). Et Sweetback devient le premier film à succès autoproduit par des Afro-Américains : pour un budget de production inférieur à 100 000 $, il compte plus de 10 millions de recette.

« Jusqu’à aujourd’hui, tous les films sur les noirs ont été réalisés suivant la façon de penser de la majorité anglo-saxonne. Dans leur rythme, leur discours, leur langage, ils ont été affadis pour plaire à une majorité, tout comme les restaurants chinois limitent la quantité d’épices pour plaire aux goûts des américains. Je veux que les spectateurs blancs aillent voir Sweetback de la même façon qu’ils iraient voir un film italien ou japonais. Ils doivent comprendre notre culture », explique Melvin Van Peebles dans son journal de tournage. Voilà donc la volonté affichée tout au long du film de créer une autre façon de filmer, une « touche » afro-américaine : surimpression de dessins (de style funky), jeu sur les contrastes, couleurs flashies et enseignes lumineuses défilent lors des plans urbains, mise en scène rythmée par la musique (les plans se superposent au son des percussions ou des cris du chanteur), réutilisation de plans sous différents angles... Van Peebles réussit en parti ce pari de créer un style puisqu'on retrouve dans les autres films des années 70 certaines de ces caractéristiques visuelles (toutefois sans le montage très "nouvelle vague").

Quant au personnage de Sweetback, c'est la représentation idéalisée de l’Afro-Américain : combatif, fier de ses racines et de son physique. Il est courageux sans être particulièrement surhumain. Il n’hésite pas à s’attaquer à des policiers -blancs- pour sauver un leader noir qui se fait tabasser sous ses yeux. La mort des agents est toujours lente et agonisante : frappés à coup de menottes en guise de poing américain, étranglement et queue de billard enfoncée dans le coeur… Mais il n’utilise la violence que pour se défendre. Sweetback sacrifie plusieurs fois sa sécurité et son bien-être individuels pour sauver Mu-Mu, le leader noir.
Il est présenté comme un être particulièrement « sexué ». Dès les premières scènes du film, on le voit nu, arborant un corps d’athlète, sur lequel la caméra s’appesantit. A la conclusion d’une des scènes d’amour, on aperçoit même son sexe (chose incroyable aujourd'hui encore). Sa sexualité débordante lui permet d’une part d’en vivre et plus tard de se sortir de nombreuses situations périlleuses : coucher pour qu’une femme lui enlève les menottes, battre à un concours de « baise » la chef des Hell's Angels, coucher avec une hippy dans les fourrés pour échapper aux fouilles des policiers...

Le casting, c'est la communauté afro-américaine, pour la plupart des inconnus interrogés pour savoir s'ils ont vu Sweetback. Quelques actrices et acteurs apparaîtront dans ce qui deviendra la blaxploitation : West Gale (Dolemite et Disco Godfather), Rhetta Hughes (Don't Play Us Cheap), Lavelle Roby (Black Gunn)... Certains même dépasseront les limites du genre et connaitront une carrière conséquente, comme bien sûr son fils Mario (qui joue Sweetback jeune) qui devient acteur et réalisateur, et John Amos -associé à jamais à Kunta Kinte adulte dans la série Roots- qui joue pour Sidney Poitier dans Let's Do it Again, aux cotés d'Eddie Murphy dans Coming to America, ou même dans des blockbusters comme Die Hard 2. Ou encore Ed Rue joue dans une poignée de film dont Black Fist, et est crédité comme ingénieur du son sur Wattstax et House Party.
Quant aux acteurs blancs, Melvin va les chercher aussi dans les séries B, ches les non-syndiqués et autres parias de la grande distribution : Nick Ferrari (Slaughter's Big Rip-Off), Ron Prince (Hot Potato), Joe Tornatore (Sweet Jesus, Preacherman, Cleopatra Jones, Top of the Heap, Black Samson), John Allen (Mo'Money), Vincent Barbi (Black Belt Jones et Dolemite).

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