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mercredi 15 septembre 2010

The Emperor Jones

Il faut attendre quelques années pour voir les studios hollywoodiens -ici United Artist- récidiver avec une production presqu'entièrement interprétée par des Afro-Américains.

THE EMPEROR JONES - Dudley Murphy (1933)

Fraîchement embauché comme employé des Wagons-lits Pullman, Brutus Jones (Paul Robeson) est fier de son uniforme et de son travail. Il est encensé par ses coreligionnaires et sa compagne lorsqu'il part pour son premier voyage. Tout au long du chemin,
Alors qu'un soir où il joue dans un tripot, une rixe éclate, Brutus tue l'homme qui l'avait agressé et se retrouve envoyé au bagne.
Il se dresse contre les brimades des gardiens racistes et arrive à s'échapper, gagnant dans sa fuite une île des Caraïbes remplie de Noirs ignorants.
Il s'allie d'abord à Smithers un colon local (Dudley Digges), puis devient -par un subterfuge sommaire le faisant passer pour invincible- l'Empereur Jones, leur soutirant de croustillants bénéfices.
Le film est tiré d'une pièce de théatre d'Eugène O'Neill, dans laquelle Paul Robeson avait déjà jouer 13 ans auparavant. Comme dans toutes les productions "all black", les scènes de danses, chants et cabarets ne manquent pas, et de nombreux ajouts à la pièce originale permettent à Robeson de nous gratifier de sa voix de baryton. Mais on est loin de la poésie et de l'éloge de la lenteur de Hallelujah !
Et plus encore que ce dernier (sans doute aussi à cause de l'absence de cette empathie et de cet onirisme), ce film est contestable dans son racisme disséminé tout du long (ce qui est étonnant pour un militant des droits civiques comme Paul Robeson, marqué du sceau de "communiste", qui avait refusé quelques années auparavant de jouer dans Hallelujah !).
Le générique d'abord, il présente la quintessence de la caricature du sauvage primitif noir : la tribu des joueurs de tam-tam ; par un fondu la caméra nous emporte dans une église baptiste où chantent des Afro-Américains. La continuité paraît évidente...
Dans la partie précédente, je parle des "gardiens racistes" ; en fait, je dois bien avouer que je fais moi-même ce raccourci. Dans le film, il n'y a rien d'aussi explicite. Dans la même veine, lorsque Robeson assomme son garde, on ne fait que l'imaginer, les sales obscures ne sont pas prêtes à offrir leurs toiles à un Noir assommant un Blanc... et encore moins les producteurs assumer un tel geste.
Pourtant, il est notable de voir les studios s'intéresser aux oeuvres mettant en scène des Afro-Américains, et il est indéniable que ce film -entre autres- contribue à l'éclosion de stars afro-américaines. De même, il faut noter des scènes tout de même rares pour l'époque, comme un Noir torse-nu à l'écran.

C'est une des premières apparitions cinématographique pour le talentueux et prometteur danseur de claquettes Harold Nicholas, des célèbres Nicholas Brothers, et les premiers grands rôles pour Fredi Washington et Ruby Elzy. Dans les scènes de cabaret on peut aussi apercevoir Billie Holiday (dont la biographie -Lady Sings the Blues- sera produite 40 ans plus tard Berry Gordy, avec Diana Ross dans le rôle-titre), Lorenzo Tucker, célèbre à son époque pour être le "Valentino noir" ou encore Moms Mabley, qui sera mise en vedette d'une -mauvaise- comédie durant la vague blax : Amazing Grace.


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