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jeudi 17 juillet 2014

A l'ombre d'Hollywood : le cinéma noir indépendant 1910-1950


A voir absolument !

A l'ombre d'Hollywood est un film de Régis Dubois, qui fût un des premiers universitaire français à écrire sur les Afro-Américains dans le cinéma. Créateur du Sens des images, réalisateur de divers documentaires (sur les Beatles, sur un club de boxe marseillais ou le cinéma d'exploitation), auteur de plusieurs livres sur cinéma et idéologies, voilà Régis Dubois qui revient en image sur un thème déjà exploré dans son livre Le cinéma des noirs américains entre intégration et contestation : les films afro-américains de l'entre-deux-guerre.
Il s'agit d'un pan important de la production cinématographique, d'un cinéma noir indépendant qui propose d'autres représentations des Afro-Américains que le cinéma hollywoodien.
De films largement méconnus voire oubliés, Régis Dubois nous en propose une histoire agrémentée d'extraits en VOst, d'anecdotes et une analyse mesurée et pertinente.
"Alors c'est sûr, avec en moyenne une douzaine de films réalisés par an, tout genre et tout métrage confondus, les race movies demeurent anecdotiques comparées aux 300 ou 400 long métrages produits tous les ans par Hollywoood. Mais cela permit au moins, épisodiquement, à toute une population discriminée d'exister sur grand écran, de s'inventer un imaginaire, de vibrer et de vivre au diapason d'un autre rêve américain. Un peu plus modeste soit, mais tout aussi palpitant."
A L'OMBRE D'HOLLYWOOD :
le cinéma noir indépendant 1910-1950
Régis Dubois (2014)

mercredi 9 juillet 2014

Figures de la révolution africaine


FIGURES DE LA REVOLUTION AFRICAINE
De Kenyatta à Sankara
Saïd Bouamama (Zones, 2014)

Sociologue et enseignant à Lille, Saïd Bouamama est surtout, pour moi, un intellectuel militant qui allie la recherche universitaire et l'engagement politique. L'un et l'autre se nourrissant.
C'est aux révolutions africaines qu'il s'attaque dans son dernier ouvrage. Bouamama décrit les mouvements de libération nationale à travers leurs leaders et les débats stratégiques et tactiques qui les animent.
Dans un style très accessible (mais sans céder aux raccourcis simplistes), Saïd Bouamama rappelle brièvement les conditions de la colonisation européenne et la résistance qu'ont toujours rencontré les puissances coloniales, avec plus ou moins de réussite.
Outre les histoires individuelles et collectives que transmet l'auteur (j'avoue humblement que je ne connaissais pas Kwame Nkrumah ou Amílcar Cabral), c'est toute l'effervescence intellectuelle mondiale qui est frappante. D'abord avec ces allers-retours qui débutent par l'émergence de deux voies afro-américaines représentées par W.E.B. Dubois et Marcus Garvey, pronant respectivement le pan-négrisme et le panafricanisme, traversent l'Atlantique et influencent les futurs leaders africains qui en retour, une fois accumulées les expériences, viennent alimenter la pensée et l'action d'un Malcolm X.
Bouamama rend aussi un hommage particulier -et légitime- à Frantz Fanon. Il lui consacre évidemment un portait et développe sa pensée ; surtout, il valide ses théories au fur et à mesure de l'exposé des expériences révolutionnaires africaines, dont les succès comme les échecs se mesurent souvent à la prise en compte, ou non, des préconisations politiques de Fanon. Ceci  culmine avec la stratégie populaire des "zones libérées" du Guinéen Amílcar Cabral ou de la trop brève expérience sankariste au Burkina Faso.


Le livre est lisible en ligne, gratuitement, sur le site des éditions Zones. Quand les bourses le permettent, je ne saurais trop vous conseiller de l'acheter et le ranger dans votre bibliothèque.

mardi 8 juillet 2014

Un été studieux...

Depuis un an, c'est avec pas mal de difficultés que je tente de tenir à jour ce blog. Empêtré dans ma vie quotidienne bien -voire trop- remplie, il s'est avéré très dur de produire assez de chroniques pour alimenter les colonnes de Rated X. Pourtant les projets ne manquent pas et sont pour beaucoup bien entamés (comme un panorama de la représentation du soldat noir dans les films tout au long du XXème siècle ou une filmographie de Woodie Strode).
Pour l'été, et en attendant une rentrée que j'espère plus conséquente en publications, j'écrirai quelques posts sur quelques lectures que j'ai envie de partager...

vendredi 11 avril 2014

Black Jesus

Avant d'être le producteur de Superfly et Superfly T.N.T., puis le réalisateur du Return of Superfly, Sig Shore s'attèle à diffuser des films étrangers doublés pour le marché US. Il importe ainsi Les 400 coups ou Hiroshima, mon amour ainsi que le très réussi Black Jesus, assis à sa droite avec l'acteur afro-américain Woody Strode...

BLACK JESUS - Valerio Zurlini (1968)

Maurice Lalubi (Woody Strode) est un leader africain qui lutte contre la colonisation de son pays. Pour exalter la ferveur populaire contre les forces coloniales, Lalubi passe de villages en villages pour convaincre les habitants de se soulever pacifiquement. Mais, trahi par un de ses plus proches camarades, il est arrêté et torturé par l'armée coloniale...
Le titre pourrait faire penser à une de ces adaptations dont la blaxploitation a le secret, mais la date de sortie (1968, soit trois ans avant la déferlante blax) et la production italienne démentent à priori ce préjugé. Et effectivement, Black Jesus est un drame politique qui retrace plus ou moins les derniers jours de Patrice Lumumba au Congo (les noms propres ont toutefois été changés).

Le film n'a pas la carrière qu'il mérite ! Réellement bien filmé, il parvient difficilement à franchir les frontières italiennes. D'abord, il est une victime collatérale du mois de Mai 68 français et de l'annulation du festival de Cannes, où il devait être présenté en avant-première. Aux Etats-Unis, il est mal diffusé, certains distributeurs incompétents voulant même le sortir sous le titre Super Brother !). Tous ces déboires altèrent la large réception de ce film pourtant de très bonne facture.
La réalisation est somme toute classique mais efficace. Valerio Zurlini aurait pu livrer un brûlot entendu, politiquement didactique et visuellement radical. Il fait tout le contraire ; la  violence y est sourde et suggérée, mais aucunement atténuée par cette pudeur bienvenue. 

Le rôle central échoie à Woody Strode qui acquiert enfin un rôle à sa mesure après tant de faire-valoir et même de bouffons dans les nombreux westerns et peplums dans lesquels on le retrouve : Sergent Rutledge, Spartacus, Il était une fois dans l'Ouest, The Professionals... On le retrouvera dans le documentaire Black Rodeo et en guest dans le Posse de Mario Van Peebles.

dimanche 30 mars 2014

E! True Hollywood Story : Superfly - Ron O'Neal


SUPERFLY / RON O' NEAL
E! TRUE HOLLYWOOD STORY - (2000)

Diffusé depuis 1996 sur la chaine américaine E!, l'émission E! True Hollywood Storyconsacra un de ses numéros à Ron O' Neal et au phénomène Superfly.

Plus complet que One Last Deal, supplément du DVD, ce documentaire évoque le film Superfly du point de vue de la carrière de Ron O'Neal, un biais pertinent qui permet d'explorer les effets du film sur la production cinématographique, sur la carrière de son acteur principal et sur la société...
Au rang des témoins, les principaux artisans du projet encore en vie amènent leur petites anecdotes : le scénariste Philip Fenty, le producteur Sig Shore, les acteurs Sheila Frazier et Julius Harris... et surtout Ron O'Neal en personne.

Outre la présentation convenue du film et de sa BOF signée Curtis Mayfield, le docu revient sur les accusations de magnifier la drogue, le deal et la prostitution et sur l'invention, par ses détracteurs, du terme "blaxploitation". D'autres protagonistes de l'époque apportent leurs avis sur cette mode cinématographique ; parmis eux Gloria Hendry et Fred Williamson, les réalisateurs/acteurs Mario Van Peebles et Bill Duke, le réalisateur Jack Hill... et les spécialistes incontestables des Afro-Américains au cinéma Donald Bogle et David Walker.


jeudi 13 mars 2014

The Return of Superfly

Après le plantage de Superfly T.N.T., on aurait pu penser que c'en était fini de Priest... 

THE RETURN OF SUPERFLY - Sig Shore (1990)

Après une vie rangée en Europe, Priest (Nathan Purdee) débarque à New-York, la ville qu'il avait quittée presque vingt ans auparavant pour échapper au deal. Mais il ne revient pas pour les affaires, Priest est de retour pour enquêter sur le meurtre de son ami Eddie (Rony Clanton), son associé du temps prospère mais mortifère du trafic de dope...
Même si le précédent Superfly T.N.T. était déjà partiellement raté, je fais partie de ceux qui regrettent de faire une suite en changeant l'acteur principal, surtout pour un personnage comme Priest si indisociable de Ron O'Neal. Et c'est peu dire que Nathan Purdee nous rappelle l'absence cruelle de l'orginial.
Cependant, le scénario tient à peu près la route et Priest retrouve les ruelles sombres de la Grosse Pomme, les ambiances lourdes et le milieu du deal... Tombés les costumes flashies et la classe d’apparat, on est dans les années 90 avec son lot de désillusions, les conséquences de deux décennies de ravage de la drogue dans la Communauté et les affrontements entre mafias qui prospèrent...
La réalisation de Sig Shore n'est pas concluante ; mais son expertise en Superfly le désigne apparemment puisqu'il produit les deux précédents volets (on le retrouve aussi aux commandes de l'intéressant Black Jesus).
L'ensemble est donc inégal et l'on ressort déçu avec un personnage principal qui ne fonctionne pas. Mais il y a d'autres éléments acceptables voire ultra-réussis ! Dans ce dernier cas, il s'agit bien sûr du retour de Curtis Mayfield aux commandes de la BOF et vient revisiter son thème déjà parfait ; un vrai plaisir qui permet de laisser passer les 95 minutes sans trop s'ennuyer...
Le public ne s'y trompe pas : avec des recettes qui peinent à dépasser les 600 000 $, le film n'a conquis ni les fans de la première heure, ni la nouvelle génération qui va rapidement coller au urban films comme Menace II Society, Juice ou New Jack City.

On retrouve avec plaisir la resplendissante Margaret Avery, le jeune Eric Payne, John Canada Terrell (un des trois amants de Nola Darling), Leonard L. Thomas, le rappeur Tone Loc qui interprète aussi un des morceaux...
Révélé par Spike Lee dans Do the Right Thing ou Mo' Better Blues et encore peu connu, Samuel L. Jackson est de la partie. Et en guest : Rony Clanton, le héros du drame blax' The Education of Sonny Carson, dans un caméo tout aussi rapide que symbolique.

samedi 1 mars 2014

Superfly T.N.T.

Superfly méritait-il une suite ? Pas sûr. Mais Ron O'Neal passe derrière la caméra pour cette séquelle sans grand intérêt...

SUPERFLY T.N.T. - Ron O'Neal (1973)

Après avoir délaissé ses activités de dealer, Priest  (Ron O'Neal) mène une vie tranquille à Rome avec sa petite amie Georgia (Sheila Frazier). Loin des rues new-yorkaises, il s'adonne aà l'équitation et au poker. C'est lors d'une de ses parties qui rencontre le Docteur Sonko (Roscoe Lee Browne), un révolutionnaire africain en exil. Ce dernier sollicite Priest pour l'aider dans son combat contre la puissance coloniale qui oppresse son pays, Umbia.
Sonko veut profiter de Priest pour fournir des armes à la rébellion...
Cette séquelle du cultissime Superfly dément l'adage selon lequel on serait mieux servi que pas soi-même. En effet, c'est Ron O'Neal lui-même qui réalise ce second volet des aventures de son alter ego Priest. Et il faut bien avouer que le charme n'opère plus. L'ambiance si particulière des ghettos US a été troquée pour les rues de Rome et la mythique Cadillac Eldorado contre une Lamborgini. Forcément moins percutante que la BOF de Curtis Mayfield, le groupe ghanéen Osibisa assure tout de même une partition tantôt envoutante tantôt envolée et qui colle aux différentes scènes.
On retiendra tout de même l'interprétation de Roscoe Lee Browne (Black Like Me, Up Tight !, The Liberation of L.B. Jones, Uptown Saturday Night, Jumpin' Jack Flash) ; forcer l'accent français rend son jeu parfois hésitant, mais dans l'ensemble il campe assez parfaitement le militant anti-colonialiste et s’imprègne de ce qu'il joue et s'avère convaincant dans ses diatribes enflammées pour convaincre Priest...

Priest a bien gardé ses costumes, mais dans les rues italiennes le charme pimp n'opère plus ; on sourit même à son accoutrement de jockey et à la manière dont il dompte des chevaux.
Quant à la réalisation de O'Neal elle est totalement catastrophique, sans aucune bribe de connaissance sur comment s'y prendre. Plans trop longs, montage nul, mauvaises (et rares) scènes d'action... tout est raté dans ce Superfly T.N.T. qui n'a d'explosif que le titre.

Pourtant les conditions étaient réunis pour faire quelque chose d'acceptable. Philip Fenty (qui réalise quatre plus tard The Baron) est toujours scénariste, assisté de O'Neal et du producteur Sig Shore. Plus étonnant, le journaliste et écrivain Alex Haley est lui aussi à l'origine de cette histoire (on le connaît surtout comme le biographe de Malcolm X ou encore l'écrivain de Roots) qui amène probablement l'idée de l'épopée africaine.
Etonnante coïncidence d'ailleurs pour ce voyage en Afrique de l'ancien dealer emblématique de la blaxploitation, puisque sort le même jour Shaft in Africa, autre héros blax' transporté sur ce continent. Ici, on a droit à un petit clip sur les artisans et enfants locaux et des inserts de la prison de l'île de Gorée en guise de "prise de conscience" du héros.

Niveau distribution, on retrouve Sheila Frazier dans son rôle assez pauvre de petite amie du héros et quelques seconds couteaux blancs dékà croisés ça et là, tels Dominic Barto (Shaft & Body and Soul) et William Berger (Three Tough Guys).


lundi 24 février 2014

One Last Deal - Superfly Documentary


ONE LAST DEAL (2003)

Sorti sur le DVD, ce petit documentaire revient sur le phénomène Superfly, un grand classique pour plusieurs générations. Des participants au film viennent apporter leurs visions et leurs anecdotes : l'acteur Julius Harris, le scénariste Philip Fenty (qui écrit aussi Superfly T.N.T. et réalise The Baron) et le producteur atypique Sig Shore qui débuta en distribuant aux Etats-Unis Les 400 coups et Hiroshima Mon Amour, puis un excellent film italien pré-blaxploitation, basé sur la vie de Patrice Lumumba : Black Jesus.
D'autres personnalités, tels le producteur Warrington Hudlin et l'acteur John Amos, témoignent de l'impact de la blaxploitation et du nouvel héros afro-américain qu'impose le genre...


samedi 22 février 2014

Superfly

Je vous propose pour les prochaines chroniques un retour sur un film emblématique de la blaxploitation : Superfly !


SUPERFLY - Gordon Parks Jr. (1972)

Priest (Ron O'Neal) est un dealer important de Harlem. Mais il en marre de cette vie et décide de raccrocher. Il compte finir  sur un dernier coup avec son pote Eddie (Carl Lee). Un million à se partager après avoir revendu 30 kg de cocaïne pure et après la belle vie !
Pour la matière première, il peut compter sur Scatter (Julius Harris), son ancien mentor rangé des affaires.
Mais les choses tournent mal après l'arrestation d'un de ses petits vendeurs, Fat Freddie (Charles McGregor), qui donne des infos à la police...
Premier film pour Gordon Parks Jr. (il n'en réalise que quatre - Thomasine & Bushrod, Three the Hard Way et Aaron Loves Angela), et le succès est direct. Produit pour seulement 300 000 $, il en rapporterait près de 30 millions, Superfly marque les esprits de son temps et imprègne la culture populaire afro-américaine ; à l'image de la Cadillac Eldorado customisée qui lance la mode appelée "pimpmobile" (déclinée dans les années 2000 dans le realityshow Pimp my Ride).

Si l'on doit retenir un seul parallèle avec le Shaft de son père, c'est dans la scène d'ouverture ; on retrouve un sens particulier pour planter le décor. Deux petites frappes déambulent dans Harlem, accompagné de la chanson Little Child Runnin' Wild de Curtis Mayfield. La musique et les deux personnages annexes provoquent une plongée magique dans le Harlem des années 70s.
Il faut dire que sa musique et les différents titres (celui évoqué précédemment ou encore Freddie's Dead, Pusherman ou Superfly) sont intimement lié à la réussite du film. La musique et la voix envoûtantes de Mayfield sont un acteur à part entière de cette production devenue culte et sont, comme la mode du pimpin', repris amplement par les rapeurs des 90s (dont par exemple l'hommage à la blax' de Snoop Dogg : Doggy Dogg World).

C'est le premier rôle d'ampleur pour Ron O'Neal (qui en avait tenu un petit dans The Organization). Totalement identifié à son personnage, il ne parviendra pas vraiment à rebondir au fil du temps, contrairement aux Jim Brown, Pam Grier et autre Fred Williamson.
Le reste de la distribution est composée d'actrices et acteurs de la période : Carl Lee (pour la petite histoire, il joue dans The Cool World le rôle d'un caïd appelé... Priest !), Sheila Frazier qui rejouera pour les Parks père et fils (The Super Cops et Three the Hard Way) et retrouve Ron O'Neal dans Superfly T.N.T. et The Hitter, ou bien encore Julius Harris, Charles McGregor et K.C., véritable pimp qui fournit la Cadillac du héros, assure la sécurité du tournage moyennant une place au générique et un petit salaire  (idem dans Across 110th Street et That's the Way of the World).

Le producteur Sig Shore avait débuté dans le cinéma en distribuant des films étrangers comme Les 400 coups et Hiroshima Mon Amour ou encore Black Jesus (un film italien pré-blaxploitation, basé sur la vie de Partice Lumumba) ; il trouve ici une franchise qu'il exploite jusqu'au bout en produisant la séquelle Superfly T.N.T., puis récidive en 1990 avec The Return of Superfly qu'il réalise. Le scénariste Phillip Fenty écrit les deux premiers opus (puis écrit et réalise The Baron avec Calvin Lockhart).

Comme pour Black Caesar ou The Mack, le film tombe presqu'à son corps défendant, dans le piège de la glorification du deal et la banalisation de la drogue au mieux, dans la persistance d'un cliché présentant les Afro-Américains comme des délinquants au pire. Bien sûr, on ne peut faire le procès à Gordon Parks d'avoir sciemment voulu l'un ou l'autre ; la volonté du héros de vouloir arrêter, tout comme le dénouement tendent à prouver le contraire mais Priest fonctionne pour la jeunesse noire des 70s comme Scarface aujourd'hui, une sorte de modèle du gars d'en bas qui s'en sort par tous les moyens.
Le film sera d'ailleurs sur la liste noire de la Coalition Against Blaxploitation menée par le révérend Jesse Jackson (qui rassemble entre autres la puissante NAACP et le SCLC créés par Luther King).


dimanche 16 février 2014

Civil Brand

Petit détour par ce film relativement inconnu et plus pertinent qu'il n'y paraît...

CIVIL BRAND - Neema Barnette (2002)

Condamnée pour avoir tué son mari violent, Frances (LisaRaye) arrive à Whitehead,un établissement pénitentiaire pour femmes.
Elle se lie avec Lil' Momma et Wet (Lark Voorhies & Monica Calhoun) ; elles lui apprennent les règles, les clans à éviter, le travail forcé à l''atelier de couture et les pratiques du capitaine Deese (Clifton Powell) qui harcèle les détenues et leur extorque des faveurs sexuelles.
Entre leurs conditions de travail esclavagistes et les violences des gardiens, les détenues fomentent la résistance...
Le scénario est signé Preston A. Whitmore II (Fled, Crossover, This Christmas), et la réalisation est assuré par une quasi-inconnue : Neema Barnette. Le budget de production est maigre (un demi-million) et les recettes plus encore ; le film rapporte seulement 250000 $. Les critiques sont assez dures, mais il acquiert une certaine renommée auprès du public et décroches des prix dans plusieurs festivals afro-américains.

Ecartons rapidement le négatif : la narration de la rapeuse Da Brat (demi-sœur à la ville de LisaRaye) s'avère un effet complètement raté ; en plus son jeu est trop exagéré et le résultat confine des fois à la parodie. Cette impression est d'autant plus renforcée dans la catastrophique VF ! Dommage, sa prestation dans Carmen : A Hip Hopera laissait espérer...
Une fois posée cette erreur manifeste, le film est plutôt intéressant, donnant la place centrale à des femmes et à leurs problématiques spécifiques : violences conjugales, mère seule, viol, exploitation...

Le casting, dirigé par Monica R. Cooper, est limité à une vingtaine de membres, dont la plupart on tout de même une certaine expérience : Monica Calhoun et LisaRaye avaient préalablement joué ensemble dans The Players Club et Gang of Roses, la rapeuse MC Lyte, la Lisa de Sauvés par le gong : Lark Voorhies (How to Be a Player, How High), N'Bushe Wright (Fresh, Dead Presidents, Blade, A Woman Like That), Tichina Arnold (Big Momma's House, The Lena Baker Story, Dance Flick et surtout la série Everybody Hates Chris).
Coté masculin, Mos Def incarne le sympathique gardien tandis que Clifton Powell entre dans la peau du salopard, un registre à contre-emploi qu'il maîtrise totalement.
Pour l'anecdote, le décorateur Tommy Estridge débute sur deux classiques de la blaxploitation : Friday Foster et Dr. Black, Mr. Hyde.

mercredi 5 février 2014

Carmen : A Hip Hopera

On quitte les buddy movies pour un passage rapide par la case comédie musicale avec cette Carmen revisitée...

CARMEN : A HIP HOPERA - Robert Townsend (2001)

Derek Hill (Mekhi Phifer) est un petit flic en uniforme de Philadelphie, fiancé et à la vie toute tracée. Mais il rencontre Carmen Brown (Beyoncé Knowles) et plus rien ne sera jamais comme avant !
D'abord Derek hésite à l'arrêter, malgré l'ordre de son supérieur le Lieutenant Miller (Mos Def). Ensuite au lieu de l'emmener directement au commissariat, il accepte de la déposer chez elle pour prendre quelques affaires... et bien sûr la belle le fait succomber à ses charmes. Au matin, Derek est cueilli par Miller et envoyé en prison.
De son coté, Carmen et ses copines (Rah Digga & Joy Bryant) rencontrent la star du rap Blaze (Casey Lee), qui tombe sous le charme de Carmen et lui propose de l'accompagner à Los Angeles ; ses amies acceptent, elle refuse attendant la libération de Derek. Et lorsqu'il sort, les deux tourtereaux s'envolent pour L.A. mais les ennuis s'accumulent...
Dans la fin des années 80, les réalisateurs afro-américains étaient rares, ceux qui osaient avoir un avis sur la place des Noirs à Hollywood se comptaient sur les doigts d'une main. Robert Townsend en faisaient parti avec des films aussi réussis qu'Hollywood Shuffle et The Five Heartbeats (et les plus légers The Meteor Man et B*A*P*S). Mais la voie de l'indépendance n'est pas un chemin pavé de roses et Towsend s'est vu cantonné dans les années suivantes à réaliser pour des séries et films pour la télévision.
Ici, il est aux commandes d'une production MTV qui bénéficie d'un casting pour le moins alléchant, dont les trois principaux : Beyoncé, Mekhi Phifer et Mos Def !

L'opéra Carmen, lui-même tiré d'un roman, a été maintes fois adapté au cinéma. Mais, il n'avait pas eu de transposition dans un milieu afro-américain depuis l'intéressant Carmen Jones d'Otto Preminger avec Dorothy Dandridge et Harry Belafonte.
De Carmen, cet "hip hopéra" s'écarte un peu trop à mon sens : d'abord par le dénouement qui change donc l'esprit général par rapport à l’œuvre originale, ensuite par la BO -pas mauvaise- qui ne reprend aucun des thèmes majeurs (et ultra-connus) de Bizet. La réalisation efficace, mais sans génie, et Towsend ne parvient pas à faire de ce téléfilm autre chose qu'une succession de (plus ou moins bons) clips.

La prestation de Beyoncé, Mekhi Phifer et Mos Def est de bonne tenue. Les deux derniers s'en sortent même très bien dans les phases de jeu classique et préparent déjà leur reconversion de la musique vers les petits et grands écrans.
Mais les surprises de la distribution ne s'arrêtent pas là. Il y a Wyclef Jean en diseur de bonne aventure, le tout jeune Lil' Bow Wow qui fait ses premiers pas d'acteur ou encore la star de la blaxploitation Fred "The Hammer" Williamson toujours aussi athlétique !
Citons encore Michael Elliot (Like Mike, Brown Sugar, Just Wright), les B-girls Rah Digga et DaBrat (rapeuse de seconde zone et demi-sœur de l'actrice LisaRaye, avec qui elle joue dans Civil Brand), Casey Lee (pote des frères Wayans qui jouent plusieur fois à leurs cotés dans Don't Be a Menace, la série TV, White Chicks, Dance Flick) ou encore Joy Bryant pour son premier film (on la retrouvera au fil des ans dans des seconds rôles dans Showtime, Baadasssss !, Get Rich or Die Tryin et Welcome Home, Roscoe Jenkins...)

samedi 25 janvier 2014

Bad Boys II

Presqu'une décennie après Bad Boys, Michael Bay récidive...

BAD BOYS II - Michael Bay (2003)

Huit ans ont passés, mais Mike Lowery et Marcus Burnett (Will Smith & Martin Lawrence) font toujours équipe dans la police de Miami. Mais l'un comme l'autre commencent à préparer en cachette leur mutation...
Mais pour l'instant, les voilà en guerre contre un des plus puissants baron de la drogue de Floride : Johnny Tapia (Jordi Mollà). Non seulement le bonhomme est coriace, mais il compte en sus s'allier à la mafia russe. En parallèle, la sœur de Marcus, Syd (Gabrielle Union) une agent de la DEA, est d'une part sur la piste de Tapia et, d'autre part, entretient une relation avec Mike...
Avec un important budget de production 130 millions, ce blockbuster répond très largement aux attentes des financiers en engrangeant des recettes deux fois supérieures.
Tout est assez classique dans ce film, et l'on peut quasiment calquer les critiques positives comme négatives du premier opus. Les scènes d'action sont parfaitement réalisées, efficaces et à rebondissement multiples qui font la patte de Michael Bay. Le duo Will Smith/Martin Lawrence -dont les voix françaises reviennent à Greg Germain et Lucien Jean-Baptiste- fonctionne selon les mêmes ressorts, avec un Lawrence faire-valoir du jeune premier Smith. L'humour est au rendez-vous mais fonctionne trop souvent sur de la grossièreté gratuite et une fâcheuse tendance à la misogynie et à l'homophobie...
Par ailleurs, Michael Bay prend ici le parti d' "unifier" les afro-américains, en l'occurence ses héros, avec les latinos qui revendiquent cette solidarité par anticastrisme, le méchant mafieux étant le "plus grand fournisseur d'argent sale de Castro". Michael Mann, dans son Miami Vice, prendra un tout autre parti (moins politiquement correct mais plus réaliste) où les dealers sont Colombiens et alliés avec l'extrême droite et où Cuba représente un asile pour les héros. Deux visions du monde déformées, mais je préfère la seconde.

Des seconds rôles font le lien entre les deux films, comme Theresa Randle, John Salley ou Joe Pantoliano. Bay s'offre en outre une nouvelle recrue de choix en la personne de l'énergique et envoutante Gabrielle Union.