Pages

jeudi 19 juillet 2012

Shaft in Africa

Après Shaft et Shaft's Big Score, Gordon Parks abandonne la caméra. John Guillermin envoie le privé de Harlem en Afrique et le titre français annonce la couleur : Shaft contre les trafiquants d'hommes...

SHAFT IN AFRICA - John Guillermin (1973)


Le recrutement de John Shaft (Richard Roundtree) est cette fois des plus déconcertant : enlevé par un géant africain, il est soumis à toute sorte de tests pour être enfin engagé par l'Emir Ramila (Cy Grant) afin de démanteler un réseau d'esclavage moderne.

Aidé de temps à autre par la belle Aleme (Vonetta McGee), la fille de l'Emir, le détective afro-américain va se retrouver sur les terres d'Afrique. De la capitale éthiopienne à celle de la France en passant par la Mauritanie, Shaft partage les cales des passeurs avec les clandestins, la chambre de la lubrique Jazar (Neda Arneric) ou encore des logements parisiens insalubres.
Shaft remonte la fillière des clandestins exploités organisé par le perfide Amafi (Frank Finlay)...

Gordon Parks laisse tomber son héros. Il laisse la place pour la réalisation à John Guillermin, tandis que Tydiman est remplacé par Stirling Silliphant (scénariste inspiré de In the Heat of the Night et The Liberation of L.B. Jones). La MGM exploite jusqu'au bout la franchise (en vendant dans la foulée les droits à la télévision, avec quatre mois plus tard le premier épisode The Enforcers).
Le résultat est un épisode totalement différent, totalement "bis", où l'ambiance soul est quasi absente (exceptée Vonetta McGee, le casting  s'en ressent), et le ton plus proche d'une déclinaison afro-américaine de James Bond (avec autant de conquêtes féminines que de contrées visitées).
Exit Isaac Hayes et Gordon Parks, la BO est confiée à Johnny Pate (et les Four Tops pour la chanson-titre) ; pour beaucoup de mélomane, elle dépasse la version originale de Hayes.

On se délecte d'un Shaft déambulant dans les rues parisiennes idéalisées ou entrant dans un troquet typique ; on sourit en voyant Orly, des voitures et leurs plaques minéralogiques, une affiche "Banania" (douce ironie totalement fortuite), des accents et plus généralement de la représentation des Français (en particulier des policiers), avec un chouïa d'exagération sur l'immonde pays raciste que serait la France comparée USA.
Cela pourrait juste être anecdotique, si ce n'était un pan de la critique plus générale de cette évolution du personnage et de l'esprit du film. Le joli succès des opus précédents a aiguisé les convoitises, mais à vouloir faire survivre Shaft à ses créateurs Tydiman et Parks, c'est au prix de l'abandon pur et simple de l'esprit initial (comme dans la série TV, mais de manière plus subtile). Ainsi, le héros garde tous ses attributs : il reste au top niveau bagarre, non-chaland et peu diplomate, viril, défenseur des opprimés... Mais cette dernière qualité, il ne la mets plus au service de la communauté afro-américaine mais de la lointaine Afrique, dénonçant à raison l'esclavage moderne en Europe ou l'excision (mais pour mieux "oublier" la situation encore rude des Noirs aux USA).
La représentation de l'Afrique et des Africains (réduits à l'état de figurants) est d'ailleurs particulièrement caricaturale et correspond à une vision "exotique", loin du "réalisme" revendiqué dans les deux premiers films.

Ce nouvel univers fait de ce Shaft in Africa le plus "bis" de la franchise, comme un mélange entre Savage ! et Honeybaby, Honeybaby. Violence et sexe sont les ingrédients de la réussite (finie les scènes d'amour à travers filtres et miroirs, ici le sexe est un incontestable argument de vente), et l'aspect "black and proud" est une composante du personnage, sans être déterminante à aucun moment. On passe cependant un bon moment, avec des scènes d'action sporadiques, culminant en un final explosif.

Vonetta McGee ne sert pas à grand chose malheureuseument ; elle surgit même de manière totalement improbable au milieu de nulle part, couche avec Shaft puis disparaît aussitôt...
Si l'on croise quelques seconds couteaux de la blax comme Frank McRae  (Cool Breeze, 1941, 48 Hrs., Another 48 Hrs.) et Jho Jhenkins (The Arena), l'essentiel du casting est international avec la Yougoslave Neda Arneri, l'Indien Marne Maitlan, le Français Jacques Marin et Jacques Herlin et l'espagnol Aldo Sambrell (qui rejoue avec Roundtree dans Charley-One-Eye).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire