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jeudi 7 octobre 2010

Watermelon Man

Précédant la vague de la blaxploitation, cette comédie produite par Columbia Pictures rencontra un certain succès. Melvin VanPeebles réalise et compose la partition, pour sa première -et dernière- collaboration avec un studio hollywoodien.

WATERMELON MAN - Melvin VanPeebles (1970)

Jeff Gerber (Godfrey Cambridge) travaille dans les assurances ; il vit avec sa petite famille dans une banlieue pavillonnaire, se rend en bus au travail tout les matins après sa gym et ses UV quotidiens, et couche avec sa femme Althea (Estelle Parsons) le mercredi soir.
Il se réveille une nuit et découvre avec effroi qu'il est devenu noir.
Il est d'abord persuadé que c'est un usage excessif ou un dysfonctionnement de sa lampe de bronzage qui ont causés sa transformation. Il se précipite dans un magasin pour acheter tout les produits sensés blanchir la peau et défriser les cheveux. Mais rien n'y fait...
Lorsqu'il décide de se rendre à son travail comme à l'accoutumé et de , il fait rapidement l'expérience du racisme et de la ségrégation : arrêté sans raison, interdit d'entrée dans son club, sommés de quitter le voisinage à coups de téléphone anonymes... Le regard envieux de la secrétaire
Le scénario s'appuie sur le roman de Herman Raucher ; les studios avaient demandé à Peebles de tourner deux fins alternatives : l'une où Gerber se réveille à la fin du film comme ayant vécu un horrible cauchemar, l'autre étant l'actuelle (je ne vous en dirais donc pas plus). VanPeebles se targue d'avoir tourner uniquement cette dernière. Heureusement pour nous et pour le sens du film en tout cas...
La réalisation de VanPeebles est dans l'ensemble conventionnelle ; mais l'on sent déjà poindre une volonté esthétique tout personnelle à travers l'utilisation de filtres colorés et quelques scènes survoltés avec une caméra épaule fébrile.

A noter la véritable performance -aussi bien dans sa version blanche qu'authentique- de Godfrey Cambridge (ce qui lui ouvre probablement les portes du succès avec son rôle dans Cotton Comes To Harlem qui contribua à lancer définitivement la vague de la blaxploitation). L'idée de confier le rôle principal à un acteur noir fait d'ailleurs passer ce film du rang de la farce de mauvais goût à celle de comédie grinçante et plus militante qu'il n'y parait (rendant obsolète le docu-fiction progressiste Black Like Me, où un journaliste blanc traversait le vieux Sud, grimmé en Noir). En détournant les blackfaces et les mangeurs de pastèques ("watermelon") d'antan, Melvin VanPeebles se place d'emblée dans la satyre presque politique et le propos du film, bien que plutôt policé, est sans concession sur les problèmes du racisme dans la société américaine (comparé à l'apartheid sud-africain), y compris chez les Blancs les plus "libéraux".

Pour couronner le tout, Melvin VanPeebles fait tourner un de ses derniers films à Mantan Moreland, acteur mythique qui symbolise les rôles dégradants confiés jusqu'alors aux acteurs afro-américains les plus talentueux. A posteriori, cette brève collaboration pourrait sonner comme un passage de témoin et surtout comme la fin d'une époque de rôles sulbalternes et stéréotypés, et l'arrivée d'une vague de productions offrant de vrais premiers rôles positifs aux Afro-Américains.
D'Urville Martin fait ses premiers pas (après sa brève apparition
dans Guess Who's Coming to Dinner), et l'on a aussi droit à un caméo de Melvin VanPeebles.

Il y a quelques années, Etienne Chatiliez avait honteusement pompé la trame de ce film avec son -mauvais- Agathe Clery. Double mauvais goût puisqu'il n'est fait nullement référence à Watermelon Man et que l'héroïne est jouée par une actrice blanche (Valérie Lemercier) ce qui rapproche plus le film des minstrel shows des années 30/40 que de l'oeuvre impertinente de Melvin VanPeebles.

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