lundi 24 février 2014

One Last Deal - Superfly Documentary


ONE LAST DEAL (2003)

Sorti sur le DVD, ce petit documentaire revient sur le phénomène Superfly, un grand classique pour plusieurs générations. Des participants au film viennent apporter leurs visions et leurs anecdotes : l'acteur Julius Harris, le scénariste Philip Fenty (qui écrit aussi Superfly T.N.T. et réalise The Baron) et le producteur atypique Sig Shore qui débuta en distribuant aux Etats-Unis Les 400 coups et Hiroshima Mon Amour, puis un excellent film italien pré-blaxploitation, basé sur la vie de Patrice Lumumba : Black Jesus.
D'autres personnalités, tels le producteur Warrington Hudlin et l'acteur John Amos, témoignent de l'impact de la blaxploitation et du nouvel héros afro-américain qu'impose le genre...


samedi 22 février 2014

Superfly

Je vous propose pour les prochaines chroniques un retour sur un film emblématique de la blaxploitation : Superfly !


SUPERFLY - Gordon Parks Jr. (1972)

Priest (Ron O'Neal) est un dealer important de Harlem. Mais il en marre de cette vie et décide de raccrocher. Il compte finir  sur un dernier coup avec son pote Eddie (Carl Lee). Un million à se partager après avoir revendu 30 kg de cocaïne pure et après la belle vie !
Pour la matière première, il peut compter sur Scatter (Julius Harris), son ancien mentor rangé des affaires.
Mais les choses tournent mal après l'arrestation d'un de ses petits vendeurs, Fat Freddie (Charles McGregor), qui donne des infos à la police...
Premier film pour Gordon Parks Jr. (il n'en réalise que quatre - Thomasine & Bushrod, Three the Hard Way et Aaron Loves Angela), et le succès est direct. Produit pour seulement 300 000 $, il en rapporterait près de 30 millions, Superfly marque les esprits de son temps et imprègne la culture populaire afro-américaine ; à l'image de la Cadillac Eldorado customisée qui lance la mode appelée "pimpmobile" (déclinée dans les années 2000 dans le realityshow Pimp my Ride).

Si l'on doit retenir un seul parallèle avec le Shaft de son père, c'est dans la scène d'ouverture ; on retrouve un sens particulier pour planter le décor. Deux petites frappes déambulent dans Harlem, accompagné de la chanson Little Child Runnin' Wild de Curtis Mayfield. La musique et les deux personnages annexes provoquent une plongée magique dans le Harlem des années 70s.
Il faut dire que sa musique et les différents titres (celui évoqué précédemment ou encore Freddie's Dead, Pusherman ou Superfly) sont intimement lié à la réussite du film. La musique et la voix envoûtantes de Mayfield sont un acteur à part entière de cette production devenue culte et sont, comme la mode du pimpin', repris amplement par les rapeurs des 90s (dont par exemple l'hommage à la blax' de Snoop Dogg : Doggy Dogg World).

C'est le premier rôle d'ampleur pour Ron O'Neal (qui en avait tenu un petit dans The Organization). Totalement identifié à son personnage, il ne parviendra pas vraiment à rebondir au fil du temps, contrairement aux Jim Brown, Pam Grier et autre Fred Williamson.
Le reste de la distribution est composée d'actrices et acteurs de la période : Carl Lee (pour la petite histoire, il joue dans The Cool World le rôle d'un caïd appelé... Priest !), Sheila Frazier qui rejouera pour les Parks père et fils (The Super Cops et Three the Hard Way) et retrouve Ron O'Neal dans Superfly T.N.T. et The Hitter, ou bien encore Julius Harris, Charles McGregor et K.C., véritable pimp qui fournit la Cadillac du héros, assure la sécurité du tournage moyennant une place au générique et un petit salaire  (idem dans Across 110th Street et That's the Way of the World).

Le producteur Sig Shore avait débuté dans le cinéma en distribuant des films étrangers comme Les 400 coups et Hiroshima Mon Amour ou encore Black Jesus (un film italien pré-blaxploitation, basé sur la vie de Partice Lumumba) ; il trouve ici une franchise qu'il exploite jusqu'au bout en produisant la séquelle Superfly T.N.T., puis récidive en 1990 avec The Return of Superfly qu'il réalise. Le scénariste Phillip Fenty écrit les deux premiers opus (puis écrit et réalise The Baron avec Calvin Lockhart).

Comme pour Black Caesar ou The Mack, le film tombe presqu'à son corps défendant, dans le piège de la glorification du deal et la banalisation de la drogue au mieux, dans la persistance d'un cliché présentant les Afro-Américains comme des délinquants au pire. Bien sûr, on ne peut faire le procès à Gordon Parks d'avoir sciemment voulu l'un ou l'autre ; la volonté du héros de vouloir arrêter, tout comme le dénouement tendent à prouver le contraire mais Priest fonctionne pour la jeunesse noire des 70s comme Scarface aujourd'hui, une sorte de modèle du gars d'en bas qui s'en sort par tous les moyens.
Le film sera d'ailleurs sur la liste noire de la Coalition Against Blaxploitation menée par le révérend Jesse Jackson (qui rassemble entre autres la puissante NAACP et le SCLC créés par Luther King).


dimanche 16 février 2014

Civil Brand

Petit détour par ce film relativement inconnu et plus pertinent qu'il n'y paraît...

CIVIL BRAND - Neema Barnette (2002)

Condamnée pour avoir tué son mari violent, Frances (LisaRaye) arrive à Whitehead,un établissement pénitentiaire pour femmes.
Elle se lie avec Lil' Momma et Wet (Lark Voorhies & Monica Calhoun) ; elles lui apprennent les règles, les clans à éviter, le travail forcé à l''atelier de couture et les pratiques du capitaine Deese (Clifton Powell) qui harcèle les détenues et leur extorque des faveurs sexuelles.
Entre leurs conditions de travail esclavagistes et les violences des gardiens, les détenues fomentent la résistance...
Le scénario est signé Preston A. Whitmore II (Fled, Crossover, This Christmas), et la réalisation est assuré par une quasi-inconnue : Neema Barnette. Le budget de production est maigre (un demi-million) et les recettes plus encore ; le film rapporte seulement 250000 $. Les critiques sont assez dures, mais il acquiert une certaine renommée auprès du public et décroches des prix dans plusieurs festivals afro-américains.

Ecartons rapidement le négatif : la narration de la rapeuse Da Brat (demi-sœur à la ville de LisaRaye) s'avère un effet complètement raté ; en plus son jeu est trop exagéré et le résultat confine des fois à la parodie. Cette impression est d'autant plus renforcée dans la catastrophique VF ! Dommage, sa prestation dans Carmen : A Hip Hopera laissait espérer...
Une fois posée cette erreur manifeste, le film est plutôt intéressant, donnant la place centrale à des femmes et à leurs problématiques spécifiques : violences conjugales, mère seule, viol, exploitation...

Le casting, dirigé par Monica R. Cooper, est limité à une vingtaine de membres, dont la plupart on tout de même une certaine expérience : Monica Calhoun et LisaRaye avaient préalablement joué ensemble dans The Players Club et Gang of Roses, la rapeuse MC Lyte, la Lisa de Sauvés par le gong : Lark Voorhies (How to Be a Player, How High), N'Bushe Wright (Fresh, Dead Presidents, Blade, A Woman Like That), Tichina Arnold (Big Momma's House, The Lena Baker Story, Dance Flick et surtout la série Everybody Hates Chris).
Coté masculin, Mos Def incarne le sympathique gardien tandis que Clifton Powell entre dans la peau du salopard, un registre à contre-emploi qu'il maîtrise totalement.
Pour l'anecdote, le décorateur Tommy Estridge débute sur deux classiques de la blaxploitation : Friday Foster et Dr. Black, Mr. Hyde.

mercredi 5 février 2014

Carmen : A Hip Hopera

On quitte les buddy movies pour un passage rapide par la case comédie musicale avec cette Carmen revisitée...

CARMEN : A HIP HOPERA - Robert Townsend (2001)

Derek Hill (Mekhi Phifer) est un petit flic en uniforme de Philadelphie, fiancé et à la vie toute tracée. Mais il rencontre Carmen Brown (Beyoncé Knowles) et plus rien ne sera jamais comme avant !
D'abord Derek hésite à l'arrêter, malgré l'ordre de son supérieur le Lieutenant Miller (Mos Def). Ensuite au lieu de l'emmener directement au commissariat, il accepte de la déposer chez elle pour prendre quelques affaires... et bien sûr la belle le fait succomber à ses charmes. Au matin, Derek est cueilli par Miller et envoyé en prison.
De son coté, Carmen et ses copines (Rah Digga & Joy Bryant) rencontrent la star du rap Blaze (Casey Lee), qui tombe sous le charme de Carmen et lui propose de l'accompagner à Los Angeles ; ses amies acceptent, elle refuse attendant la libération de Derek. Et lorsqu'il sort, les deux tourtereaux s'envolent pour L.A. mais les ennuis s'accumulent...
Dans la fin des années 80, les réalisateurs afro-américains étaient rares, ceux qui osaient avoir un avis sur la place des Noirs à Hollywood se comptaient sur les doigts d'une main. Robert Townsend en faisaient parti avec des films aussi réussis qu'Hollywood Shuffle et The Five Heartbeats (et les plus légers The Meteor Man et B*A*P*S). Mais la voie de l'indépendance n'est pas un chemin pavé de roses et Towsend s'est vu cantonné dans les années suivantes à réaliser pour des séries et films pour la télévision.
Ici, il est aux commandes d'une production MTV qui bénéficie d'un casting pour le moins alléchant, dont les trois principaux : Beyoncé, Mekhi Phifer et Mos Def !

L'opéra Carmen, lui-même tiré d'un roman, a été maintes fois adapté au cinéma. Mais, il n'avait pas eu de transposition dans un milieu afro-américain depuis l'intéressant Carmen Jones d'Otto Preminger avec Dorothy Dandridge et Harry Belafonte.
De Carmen, cet "hip hopéra" s'écarte un peu trop à mon sens : d'abord par le dénouement qui change donc l'esprit général par rapport à l’œuvre originale, ensuite par la BO -pas mauvaise- qui ne reprend aucun des thèmes majeurs (et ultra-connus) de Bizet. La réalisation efficace, mais sans génie, et Towsend ne parvient pas à faire de ce téléfilm autre chose qu'une succession de (plus ou moins bons) clips.

La prestation de Beyoncé, Mekhi Phifer et Mos Def est de bonne tenue. Les deux derniers s'en sortent même très bien dans les phases de jeu classique et préparent déjà leur reconversion de la musique vers les petits et grands écrans.
Mais les surprises de la distribution ne s'arrêtent pas là. Il y a Wyclef Jean en diseur de bonne aventure, le tout jeune Lil' Bow Wow qui fait ses premiers pas d'acteur ou encore la star de la blaxploitation Fred "The Hammer" Williamson toujours aussi athlétique !
Citons encore Michael Elliot (Like Mike, Brown Sugar, Just Wright), les B-girls Rah Digga et DaBrat (rapeuse de seconde zone et demi-sœur de l'actrice LisaRaye, avec qui elle joue dans Civil Brand), Casey Lee (pote des frères Wayans qui jouent plusieur fois à leurs cotés dans Don't Be a Menace, la série TV, White Chicks, Dance Flick) ou encore Joy Bryant pour son premier film (on la retrouvera au fil des ans dans des seconds rôles dans Showtime, Baadasssss !, Get Rich or Die Tryin et Welcome Home, Roscoe Jenkins...)