mardi 31 juillet 2012

Shaft - The Murder Machine

La première et unique saison s'arrête sur La machine à tuer.

SHAFT - Episode 7
THE MURDER MACHINE - Lawrence Dobkin (1974)

Le Lieutenant Al Rossi (Eddie Barth) vient de recueillir des aveux importants d'un repenti, capable de faire tomber un caïd important.
De son coté, John Shaft (Richard Roundtree) s'apprête à marier des amis à lui qui doivent sceller leur union au tribunal, au moment même où le prisonnier de Rossi va comparaître.
C'est ce moment qu'un tueur à gage (Clu Gulager) très consciencieux choisit pour abattre le traître ; le marié meurt lors de l'attentat. Shaft en fait une affaire personnelle et veut mettre la main sur ce tueur introuvable, qui en retour veut l'éliminer car il est le seul à pouvoir le reconnaître...
Toujours trop long et pas assez dynamique à mon goût, ce dernier opus des aventures du privé de Harlem bénéficie toutefois d'un scénario et de personnages intéressants, en particulier celui du tueur à gage incarné par Clu Gulager qui, entre deux assassinats, vit une vie de famille des plus ordinaires.

Toujours est-il qu'après sept épisodes, la série s'achève sur de mauvais bilans d'audience, et la version mi-chèvre mi-chou de Shaft qu'ont tentée de populariser les producteurs n'a pas prise : trop édulcorée pour le public originel et trop commune en tant que série policière pour capter le grand public.
Très reconnaissable avec sa boule à zéro et sa barbiche, Sid Haig apparaît dans une scène mais n'est pas crédité au générique.
Signalons dans un tout petit rôle la présence de Bill Walker, un acteur qui débute dans les années 40 dans des rôles de servant et d'employé des wagons-lits Pullman, il joue dans Riot, The Great White Hope, tick... tick... tick..., A Piece of the Action ou encore The Wiz ; fils d'un esclave affranchi, Walker milite pour les droits civiques et contracte l'un des premiers mariages inter-racial d'Hollywood (avec l'actrice canadienne Peggy Cartwright).

Shaft - The Capricorn Murders

L'affaire Capricorne : avant-dernier épisode, mais toujours peu d'âme dans cette aventure télévisuelle de John Shaft...

SHAFT - Episode 6
THE CAPRICORN MURDERS - Allen Reisner (1974)

Gil Kirkwood (David Hedison), le propriétaire de la société Capricorn INternational est aux abois, sa situation financière le pousse tenter de tuer sa femme Joanna (Cathy Lee Crosby), riche d'un collier de plusieurs millions de dollars. Celle-ci réchappe de l'incendie dans lequel son mari espérait la voir mourrir, mais le collier a disparu du coffre.
Avec un homme de main (Robert Phillips) pas très agréable dans les pattes, John Shaft (Richard Roundtree) doit protéger Johanna, retrouver le collier et dénouer un meurtre...

Le début de ce sixième volet laisse espérer avec une machiavélique machination et une tentative de meurtre au lance-flamme... mais le rythme est par trop saccadé, certaines scènes   particulièrement cheap.

Maintes fois comparse de Jim Brown (The Dirty Dozen, Slaughter, The Slams et I Escaped from Devil's Island), Robert Phillips traîne ici sa gueule cassée qui fait de lui un méchant caricatural à souhait. il joue aussi dans Detroit 9000, Mean Johnny Barrows, Cry freedom...L'équipe technique compte aussi quelques pointures comme le technicien du son Hal Watkins (Shaft, Top of the Heap, Shaft's Big Score, Hammer, Shaft in Africa, Brothers et Penitentiary), le monteur et producteur George Folsey Jr. qui participe à quelques projets blax (Black Caesar, Bone, Bucktown ou J.D.'s Revenge), à deux autres épisodes de la série Shaft (The kidnapping et The Murder Machine) puis des films de John Landis (The Blues Brothers, Trading Places, Coming to America)

lundi 30 juillet 2012

Shaft - Cop Killer

Injustice est le 5ème épisode de la série Shaft...

SHAFT - Episode 5
COP KILLER - Lee Philips (1974)

Jerry Tyler (James A. Watson Jr.), un flic honnète, tombe dans un piège tendus par des collègues qui le sont moins. Tyler est suspendu et se tourne vers John Shaft (Richard Roundtree) pour l'aider. Shaft convainc Al Rossi (Eddie Barth) d'enquêter sur ces ripoux ; mais son ami lieutenant se fait tirer dessus en pleine rue et frôle la mort.Shaft en fait un affaire personnelle !
Il enquête et parvient à infiltrer l'organisation de Wally Doyle (George Maharis) en se faisant passer pour un parfait voleur de voitures...

C'est toujours longuet et le scénario se fait presque pompeux en faisant converger plusieurs segments sans grand intérêt. Pourtant, il faut noter un final plus excitant qu'à l'ordinaire avec une course poursuite voiture/engin de chantier assez cocasse.
Il y a toujours quelques blagues entre Roundtree et Eddie Barth, dont une plutôt culottée vu l'époque : "Shaft, je me demande si Abraham Lincoln n'a pas fait une errrest eur" (en l’occurrence l'abolition de l'esclavage, bien sûr).

On pouvait noter, dès le premier épisode The Enforcers que Shaft avait troquer son cuir contre un veston -parfois accompagné d'une cravate. Ici, le privé de Harlem renfile un blouson en cuir et des lunettes de soleil, mais cette dégaine s'apparente à un déguisement de gangster ; lorsqu'il est en civil Shaft arbore toujours son pull col roulé ou sa veste... Dommage que la garde robe originelle du héros (qui permettait de le rendre cool) soit maintenant utilisée comme apanage du hors-la-loi !

George Maharis, Darren McGavin et Richard Schaal viennent étoffer le casting de cet épisode. Ainsi que la la chanteuse Talya Ferro  (Let's Do It Again et Sparkle) et le grand acteur dramatique James A. Watson Jr. ; dans les années 70s et 80s, il fut malheureusement cantonné à des rôles subalternes à la télé (quant au grand écran, il joue dans Halls of Anger, The Organization ou encore Lady Cocoa), il est aujourd'hui professeur.

Shaft - The Kidnapping

L'enlèvement transplante Shaft dans un cadre bucolique...

SHAFT - Episode 4
THE KIDNAPPING - Alexander Singer (1973)

John Shaft (Richard Roundtree) est à la une des journaux, cette fois il est célébré comme un héros pour avoir démantelé une organisation mafieuse.
Mais à trop attirer l'attention, le détective afro-américain devient la cible d'un complot : trois malfrats, apparemment noirs, kidnappent la femme d'un banquier, Elliot Williamson (Paul Burke), et exigent 250 milles dollars que seul Shaft doit livrer.
Victime d'une excès policier, Shaft se doit absolument apporter la rançon, mais aussi se cacher des policiers du shérif Bradley (Frank Marth)...
La scène d'ouverture est tirée de Shaft's Big Score, avec la course poursuite en hélicoptère. Accroche facile mais réussie, cependant cet artifice masque difficilement la poussivité de cet épisode. L'idée du gang de malfrats se faisant passer pour des noires pourraient être acceptable, mais les pérégrinations campagnardes de notre détective citadin sont d'une lenteur plombante. Quant à l'amitié avec le gentil blanc du coin, c'est d'un sentimentalisme qu'on attend surtout pas dans cette série !

On se console à peine avec la belle Jayne Kennedy (Lady Sings the Blues, Let's Do It Again, The MuthersDeath Force et Body and Soul), la femme de l'acteur Leon Isaac Kennedy ; elle ne fait qu'une brève et inutile apparition.
Coté équipe technique, on retrouve quelques noms importants du cinéma afro-américain : le directeur de la photographie Michel Hugo (Trouble Man et The Spook Who Sat by the Door) et le monteur et producteur George Folsey Jr. (Hammer, Black Caesar, J.D.'s Revenge, The Blues Brothers, Coming to America et Bulletproof). Coté blanc, il y a Tim Scott (In the Heat of the Night, Guess Who's Coming To Dinner, Kid Vengeance, Roots 2).

dimanche 29 juillet 2012

Shaft - Hit and Run

Troisième épisode des aventures télévisées du privé de Harlem : Délit de fuite...

SHAFT - Episode 3
HIT AND RUN - Harry Harris (1973)

Comme à son habitude, John Shaft (Richard Roundtree) est prêt à mettre ses services pour aider ses amis. Ici, il tente de prouver l'innocence du fils de son pote Tom Oliver (Anthony Geary & Howard Duff). Même si tout accuse le jeune homme, Shaft enquête et ses indices convergent vers Clifford Grayson (Tony Curtis), le propriétaire d'un club huppé, où les riches jouent de grosses sommes...
L'action est toujours trop limitée, mais le scénario est bien ficelée dans cet épisode rythmé qui apparaît comme un des meilleur de la série.
Le casting de ce troisième épisode, comme celui du précédent The Killing, sonne plus blax avec la présence de Judy Pace (Cotton Comes to Harlem et The Slams) que notre détective fait succomber à ses charmes. Il propose aussi un guest assez incroyable : Tony Curtis, l'enchaîné à Sidney Poitier dans The Defiant Ones, qui a pris quelques années et incarne un malfrat sans scrupule aux manières précieuses. Quant à Anthony Geary, il retrouvera Roundtree dans Crack House).

samedi 28 juillet 2012

Shaft - The Killing

Avec Le meurtre, on retrouve une ambiance plus proche du Shaft que l'on aime...

SHAFT - Episode 2
THE KILLING - Nicholas Colasanto (1973)


John Shaft (Richard Roundtree) vient en aide à une ancienne conquête, devenue prostituée : Diana (Ja'net DuBois) tabassée par son mac, l'infâme Kyle Bruckner (Leonard Frey) ! Shaft n'hésite pas à le menacer pour protéger son amie. Mais lorsque le mac est retrouvé mort, roué de coups, c'est bien entendu le détective de Harlem qui est soupçonné ! En sus, Dianan disparaît...
Pour prouver son innocence, Shaft ne peut guère compter que sur lui-même, et un peu aussi sur son pote, le Lieutenant Al Rossi (Eddie Barth)...
Plus prenant que le pilote The Enforcers, ce deuxième épisode est mieux mis en scène et plus haletant  que le premier épisode. Grâce à Ja'net DuBois (Five on the Black Hand Side, A Piece of the Action, la série Roots : The Next Generation) et un thèmatique permettant d'utiliser pimps et gangsters, on s'approche un peu de la l'esprit blax du héros de Gordon Parks.

Au casting, il y a toujours Eddie Barth, et quelques gueules comme Albert Popwell (karatéka de Cleopatra Jones et Cleopatra Jones & The Casino Of Gold), Royce Wallace (Take a Giant Step, Cool Breeze, la mère de Willie Dynamite, The Greatest Thing That Almost Happened...) et l'acteur blanc Val Avery (Black Caesar et Let's Do It Again).

Shaft - The Enforcers

Quatre mois après le troisième volet des aventures cinématographiques de John Shaft dans Shaft in Africa, le premier épisode de la déclinaison TV est diffusée sur CBS : Les justiciers.


SHAFT - Episode 1
THE ENFORCERS - John Llewellyn Moxey (1973)

Juan Otero, fraîchement acquitté du meurtre d'un policier, et son avocat Dawson sont retrouvés noyés. Contacté par la femme de ce dernier, inquiète de sa disparition, John Shaft (Richard Roundtree) enquête sur cette sombre affaire.
Il met rapidement à jour une organisation réactionnaire qui rend la justice à sa manière. Mais ses membres jouissent de places influentes, et Shaft aura bien besoin de l'aide de son ami flic, Al Rossi (Eddie Barth)...
Ce pilote est piloté par Allan Balter et William Read Woodfield, scénaristes et producteurs de la série culte Mission : Impossible et réalisé par John Llewellyn Moxey (qui fera aussi Ebony, Ivory and Jade, le spin off télévisé du film de Cirio H. Santigo).
Ce premier épisode du désormais célèbre détective de Harlem est décevante sur le fond comme sur la forme.
Le personnage de John Shaft est édulcoré, il abandonne ses mauvaises manières et troque son cuir pour des vestons proprets. Le scénario et les rares scènes d'action le rapproche d'une très ordinaire série policière. Seule la musique de Johnny Pate (déjà compositeur de Shaft in Africa) et quelques déambulations urbaines en caméra embarquée nous rappelle l'ambiance soul du film original.

Niveau casting, Eddie Barth est le seul à revenir dans les 7 épisodes (il jouait déjà un petit rôle de mafieux dans Shaft). Robert Culp (comparse de Bill Cosby dans la série I Spy et le polar Hickey & Boggs) et Richard Jaeckel (aux côtés de Jim Brown dans The Dirty Dozen et Pacific Inferno) font office de guests.
De même pour Richard Lawson, découvert dans Scream Blacula Scream, il joue dans Fox Style et Sugar Hill, le rôle titre dans Black Fist, puis après une traversée du désert il rebondit dans How Stella Got Her Groove Back, The Last Stand, Guess Who, I'm Through with White Girls..., Love for Sale, For Colored Girls.

jeudi 19 juillet 2012

Shaft in Africa

Après Shaft et Shaft's Big Score, Gordon Parks abandonne la caméra. John Guillermin envoie le privé de Harlem en Afrique et le titre français annonce la couleur : Shaft contre les trafiquants d'hommes...

SHAFT IN AFRICA - John Guillermin (1973)


Le recrutement de John Shaft (Richard Roundtree) est cette fois des plus déconcertant : enlevé par un géant africain, il est soumis à toute sorte de tests pour être enfin engagé par l'Emir Ramila (Cy Grant) afin de démanteler un réseau d'esclavage moderne.

Aidé de temps à autre par la belle Aleme (Vonetta McGee), la fille de l'Emir, le détective afro-américain va se retrouver sur les terres d'Afrique. De la capitale éthiopienne à celle de la France en passant par la Mauritanie, Shaft partage les cales des passeurs avec les clandestins, la chambre de la lubrique Jazar (Neda Arneric) ou encore des logements parisiens insalubres.
Shaft remonte la fillière des clandestins exploités organisé par le perfide Amafi (Frank Finlay)...

Gordon Parks laisse tomber son héros. Il laisse la place pour la réalisation à John Guillermin, tandis que Tydiman est remplacé par Stirling Silliphant (scénariste inspiré de In the Heat of the Night et The Liberation of L.B. Jones). La MGM exploite jusqu'au bout la franchise (en vendant dans la foulée les droits à la télévision, avec quatre mois plus tard le premier épisode The Enforcers).
Le résultat est un épisode totalement différent, totalement "bis", où l'ambiance soul est quasi absente (exceptée Vonetta McGee, le casting  s'en ressent), et le ton plus proche d'une déclinaison afro-américaine de James Bond (avec autant de conquêtes féminines que de contrées visitées).
Exit Isaac Hayes et Gordon Parks, la BO est confiée à Johnny Pate (et les Four Tops pour la chanson-titre) ; pour beaucoup de mélomane, elle dépasse la version originale de Hayes.

On se délecte d'un Shaft déambulant dans les rues parisiennes idéalisées ou entrant dans un troquet typique ; on sourit en voyant Orly, des voitures et leurs plaques minéralogiques, une affiche "Banania" (douce ironie totalement fortuite), des accents et plus généralement de la représentation des Français (en particulier des policiers), avec un chouïa d'exagération sur l'immonde pays raciste que serait la France comparée USA.
Cela pourrait juste être anecdotique, si ce n'était un pan de la critique plus générale de cette évolution du personnage et de l'esprit du film. Le joli succès des opus précédents a aiguisé les convoitises, mais à vouloir faire survivre Shaft à ses créateurs Tydiman et Parks, c'est au prix de l'abandon pur et simple de l'esprit initial (comme dans la série TV, mais de manière plus subtile). Ainsi, le héros garde tous ses attributs : il reste au top niveau bagarre, non-chaland et peu diplomate, viril, défenseur des opprimés... Mais cette dernière qualité, il ne la mets plus au service de la communauté afro-américaine mais de la lointaine Afrique, dénonçant à raison l'esclavage moderne en Europe ou l'excision (mais pour mieux "oublier" la situation encore rude des Noirs aux USA).
La représentation de l'Afrique et des Africains (réduits à l'état de figurants) est d'ailleurs particulièrement caricaturale et correspond à une vision "exotique", loin du "réalisme" revendiqué dans les deux premiers films.

Ce nouvel univers fait de ce Shaft in Africa le plus "bis" de la franchise, comme un mélange entre Savage ! et Honeybaby, Honeybaby. Violence et sexe sont les ingrédients de la réussite (finie les scènes d'amour à travers filtres et miroirs, ici le sexe est un incontestable argument de vente), et l'aspect "black and proud" est une composante du personnage, sans être déterminante à aucun moment. On passe cependant un bon moment, avec des scènes d'action sporadiques, culminant en un final explosif.

Vonetta McGee ne sert pas à grand chose malheureuseument ; elle surgit même de manière totalement improbable au milieu de nulle part, couche avec Shaft puis disparaît aussitôt...
Si l'on croise quelques seconds couteaux de la blax comme Frank McRae  (Cool Breeze, 1941, 48 Hrs., Another 48 Hrs.) et Jho Jhenkins (The Arena), l'essentiel du casting est international avec la Yougoslave Neda Arneri, l'Indien Marne Maitlan, le Français Jacques Marin et Jacques Herlin et l'espagnol Aldo Sambrell (qui rejoue avec Roundtree dans Charley-One-Eye).

mercredi 18 juillet 2012

Shaft's Big Score !

Les nouveaux exploits de Shaft : la suite que Gordon Parks offre à son héros presqu'invicible John Shaft. 

SHAFT’S BIG SCORE ! - Gordon Parks (1972)

Juste avant de mourir dans l'explosion de son entreprise funéraire, Cal Asby (Robert Kya-Hill) a le temps de planquer un joli tas de billets et de prévenir son ami  John Shaft (Richard Roundtree) qu'il a de sérieux problèmes. Shaft est aussi l'amant de sa soeur Arna (Rosalind Miles), il fait donc de la résolution de ce meurtre une affaire personnelle !
Grâce à ses liens avec le Capitaine Bollin (Julius Harris) et les gangsters Bumpy Jonas et Willy (Moses Gunn & Drew Bundini Brown), les soupçons de Shaft s'orientent rapidement vers Johnny Kelly (Wally Taylor), l'associé de Cal qui a une grosse ardoise chez le mafieu raffiné mais intraitable : Gus Mascola (Joseph Mascolo).
Shaft est prêt à tout pour démasquer les assassins de son ami...
Produit pour moins de 2 millions de dollars, ce deuxième volet de Shaft rapporte plus de 10 millions ! Réussite incontestable, Parks a investi son surplus financier dans un casting plus étoffé (dont Julius Harris, découvert dans Nothing But a Man), des décors branchés et un final énorme qui en nous en met plein les mirettes, avec mitraillage en règle dans un cimetière, poursuite en voiture, en bateau et en hélicoptère !

D'un point de vue technique, c'est probablement le plus réussi de la trilogie ; il y manque pourtant de l'âme de Harlem. Le décor s'est déplacé dans les quartier plus huppés, ce qui donne un très bon méchant maniéré et pervers incarné par Joseph Mascolo (qui joue aussi dans The Spook Who Sat by the Door), mais on y perd en ambiance urbaine. Les immeubles délabrés sont remplacés par de lumineux appartements design et des clubs branchés.
Cependant, ce dépaysement n'empêche détails et allusions plus ou moins marquées du sceau du "black power" : tension raciale au commissariat, chauffeur blanc, victoire du héros afro-américain sur les mafieux blancs... et toujours un aspect très sexualisé du héros qui multiplie les conquêtes. Tout en montrant quelques seins (coutume frivole de l'époque plutôt que voyeurisme intéressé), Parks filme les scènes d'amour à travers des filtres ou des miroirs déformants. Il n'en reste pas moins que la sexualité des Noirs est encore un tabou visuel dont Gordon Parks se joue visiblement.

Malgré de nombreux dialogues et de rares scènes d'action, la mise en scène est réussie et la réalisation parvient à donner un rythme, jusqu'à l'apothéose finale à classer parmi le tiercé gagnant des meilleures fusillades de la blaxploitation (quelques images sont reprises dans The Kidnapping) ! On retiendra aussi la scène du club, sorte de clip qui alterne show exotique de danseuses aux costumes flamboyants avec les sombres escaliers où Shaft se fait tabasser.

En sourdine le thème mythique d'Isaac Hayes, officiellement indisponible pour enregistrer, Gordon Parks se charge du soundtrack, résolument plus jazzy (il avait déjà une solide expérience avec la BOF de son premier long métrage The Learning Tree).

Drew Bundini Brown a pris un peu de galon et se retrouve en troisième position au générique, juster derrière Moses Gun, lui aussi rescapé du premier opus. De nouveaux personnages sont introduits : Julius Harris devient le nouveau lieutenant/ami de Shaft, Rosalind Miles (The Black Six, Friday Foster), Don Blakely (dans les 90s, il apparaît dans Harlem Nights et Pulp Fiction), Thomas Anderson (The Learning Tree, Trick Baby, The Legend of Nigger Charley et Don't Play Us Cheap), Wally Taylor (Cotton Comes to Harlem, Cool Breeze, Lord Shango, Crossroads, The Golden Child), Robert Kya-Hill (seulement quelques films dont Slaves) et la plantureuse Kathy Imrie, quasiment absente des écrans par la suite.
Coté équipe technique, Gordon Parks reconduit les responsables de chaque équipe de Shaft : le chef op' Urs Furrer, le costumier Joe Aulisi, Martin Bell au maquillage, les ingénieurs du son Hal Watkins et Lee Bost et le décorateur Robert Drumheller... Ainsi que Alex Stevens et Marvin Walters à la coordination des cascades.

lundi 16 juillet 2012

Soul on Cinema - Filming Shaft on Location



SOUL ON CINEMA
FILMING SHAFT ON LOCATION

Hugh A. Robertson (1971)


Pratique encore rare à l'époque, Gordon Parks prend soin de faire filmer le tournage de son Shaft. Bien lui en a pris, car on savoure avec intérêt ce making of de quelques scènes de bagarre et surtout d'un enregistrement avec Isaac Hayes qui joue sous les directives de Parks.
Ce documentaire est réalisé par le monteur de Shaft : Hugh A. Robertson. Monteur son sur The Cool World en 1964, il réalise Melinda avec Calvin Lockhart, Rosalind Cash, Vonetta McGee et Jim Kelly.

dimanche 15 juillet 2012

Shaft

Retour sur un personnage emblématique de la blaxploitation...

SHAFT - Gordon Parks (1971)

John Shaft (Richard Roundtree) est un détective privé qui officie à Harlem. Il est engagé par Bumpy Jonas (Moses Gunn), un gros caïd qui fait dans la prostitution et la drogue, pour retrouver sa fille kidnappéé, semble-t'il, par Ben Buford (Christopher St. John) et ses hommes qui composent un groupe de militants "Black Power". Bien qu'il n'aime pas beaucoup les activités de Bumpy, Shaft accepte la mission contre un salaire plus que correct.
Il met à contribution son réseau d'indics et sa connaissance de Harlem pour retrouver Ben. Lorsqu'il met la main dessus, le groupe de militants et Shaft sont victimes d'une fusillade... Et, entre le témoignage de Ben et les informations de l'inspecteur Androzzi (Charles Cioffi), Shaft comprend que la fille de Bumpy a été en fait enlevée par la mafia, passablement énervée de voir le caïd local lui raffler ses parts de marché...
Alors que la MGM était au bord de la faillite, le salut vient d'un petit photographe moustachu qui a l'idée d'adapter un roman à succès d'Ernest Tidyman ; ce dernier co-écrit le scénario avec John D.F. Black (scénariste de séries, on lui doit aussi Trouble Man).
Gordon Parks a réalisé deux ans avant The Learning Tree, un drame biographique poignant, mais la consécration lui vient de ce film emblématique d'une époque, et annonciateur de la déferlante de productions afro-américaines : la blaxploitation !

On comprend aisément le succès tant communautaire que "grand public" de ce film. Le rythme est soutenu, l'action bien maîtrisée, l'intrigue tient la route et les personnages secondaires sont bien trouvés ; rajoutons à ça la musique, véritable personnage du film, envoutante et qui colle si parfaitement aux situations... et tous les ingrédients d'un bon polar sont réunis.
Ce qui en fait un film quasi-cathartique pour la jeunesse afro-américaine c'est que jusqu'alors les points positifs que je viens d'égrainer s'appliquaient à des héros blancs pour un public blanc. Or voilà que déboule un super héros afro-américain, qui vient de la rue et ne s'en laisse pas compter, un héros qui couche avec des femmes (et des Blanches !), aide la communauté, lutte et triomphe des mauvais Blancs...

La scène d'ouverture condense tout ce qui fera l'identité de la blaxploitation : héros intrépide aux manières de bad boy, déambulation urbaine avec son cortège de commerces et d'enseignes lumieuses (jusqu'à barbershop, commerce représentatif entre tous pour les Afro-Américains), musique omniprésente signée d'une star de la soul)...
Si le film n'est pas politique au premier chef, la nouvelle image des Afro-Américains qu'il véhicule est tout de même un fait politique, comme la traduction sur grand écran du slogan Black is beautiful !
Shaft est donc un grand classique de la blaxploitation et même du cinéma des 70s, facile d'accès pour se lancer dans la Blaxploitation avec une BO de rêve par Isaac Hayes, une intrique qui tient la route, un héros qui a la classe incarné par Richard Roundtree ; le rôle qui lui collera à la peau (dans trois autres films : Shaft's Big Score, Shaft in Africa et Shaft 2000 et une série TV de 7 épisodes). Outre Moses Gunn, déjà connu, le casting regorge d'actrices  et d'acteurs qui font leurs premiers pas dans la blaxploitation et qui réapparaîtrons souvent : Antonio Fargas, Tony King, Al Kirk, Ed Bernard, Tommy Lane, Lee Steele, Alan Weeks, Gertrude Jeannette... Christopher St. John quant à lui écrit, réalise et joue dans le très bon Top of the Heap.
A signaler aussi la présence Drew Bundini Brown, proche de Muhammad Ali ; entraineur et soigneur, il serait même l'auteur du célèbre "Float like a butterfly, sting like a bee", Jamie Foxx lui prête ses traits dans le Ali de Mickael Mann. Drew Bundini Brown eut sa petite carrière d'acteur : on le retrouve dans Aaron Loves Angela, The Greatest, Penitentiary III ou encore The color Purple de Spielberg.

Il existe un court documentaire sur le tournage de Shaft : Soul on Cinema, Filming Shaft on Location.